Décision no 2000-426 DC du 30 mars 2000

JurisdictionFrance
Publication au Gazette officielJORF n°82 du 6 avril 2000
Record NumberJORFTEXT000000764754
Date de publication06 avril 2000
CourtCONSEIL CONSTITUTIONNEL
Enactment Date30 mars 2000

LOI N° 2000-295 DU 5 AVRIL 2000 RELATIVE À LA LIMITATION DU CUMUL DES MANDATS ÉLECTORAUX ET DES FONCTIONS ÉLECTIVES ET À LEURS CONDITIONS D'EXERCICE
les députés requérants mettent en cause la conformité à la Constitution de la loi déférée, en ses articles 2, 3, 7, 14, 16, 20, 22 et 25 à 31 et, pour leur part, les sénateurs requérants contestent les articles 3, 7, 14, 16, 22 et 25 à 31.
I - Sur l'interdiction du cumul de fonctions exécutives locales :
Les sénateurs requérants contestent à plusieurs titres l'interdiction de cumuler des fonctions exécutives locales qui figure aux articles 7, 14 et 16 de la loi déférée afin de rendre incompatibles entre elles les fonctions de maire, de président d'un conseil général et de président d'un conseil régional.
En premier lieu, l'interdiction critiquée méconnaîtrait le principe selon lequel " tout membre d'une assemblée territoriale doit pouvoir être élu aux fonctions exécutives de cette assemblée ". Or, le grief manque en fait puisque les dispositions critiquées, qui ont pour conséquence de faire cesser l'exercice de la fonction exécutive antérieure, n'ont ni pour objet ni pour effet d'instaurer des règles d'inéligibilité. Ainsi, les autres griefs tirés de la violation de règles et principes de valeur constitutionnelle relatifs aux inéligibilités doivent également être rejetés.
En deuxième lieu, les incompatibilités critiquées ne sont pas contraires à la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et notamment à son article 6 en vertu duquel " Tous les Citoyens étant égaux à ses yeux sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents. " . Il était en effet loisible au législateur de renforcer les incompatibilités entre fonctions électives, dès lors qu'il estimait que le cumul de fonctions exécutives locales ne permettait pas à leur titulaire de les exercer de façon satisfaisante.
En troisième lieu, en vertu de l'article 72 de la Constitution, le principe de libre administration des collectivités territoriales s'exerce " dans les conditions prévues par la loi ". Il ne fait pas obstacle à ce que le législateur édicte une règle d'incompatibilité entre fonctions exécutives locales dans le but de favoriser leur plein exercice.
En quatrième lieu, les requérants dénoncent les " incohérences entre la loi organique et la loi ordinaire " créant des " discriminations inacceptables ". Ils font valoir en outre que " ces incohérences ne peuvent pas être levées en combinant les dispositions des deux lois car, en application de l'article 25 de la Constitution, le régime des incompatibilités des parlementaires relève de la seule loi organique, supérieure à la loi ordinaire ". Mais, les règles d'incompatibilités entre fonctions exécutives locales relèvent, quant à elles, de la loi ordinaire et selon le Conseil, dans le silence de la loi organique ces règles s'appliqueront aux détenteurs desdites fonctions, qu'ils soient ou non parlementaires. Le grief doit donc être rejeté. Enfin, il ne résulte d'aucune règle constitutionnelle que le régime des règles d'incompatibilités applicables aux membres des organes délibérants des collectivités territoriales relèverait d'une loi constitutionnelle.
II - Sur les règles d'incompatibilité applicables aux représentants au Parlement européen :
Les députés dénoncent la rupture d'égalité résultant de la différence de traitement entre les représentants au Parlement européen et les députés et sénateurs. En effet, ces derniers peuvent exercer une fonction exécutive locale, et bénéficient d'une option en cas d'incompatibilité. Or, les parlementaires nationaux et les représentants au Parlement européen exercent la même mission de représentation. Et, l'incompatibilité entre mandat de représentant au Parlement européen et fonction exécutive locale constitue une " atteinte à la liberté des citoyens et à la liberté de l'élu ".
Mais, le Conseil considère que les compétences spécifiques exercées par le Parlement européen sont différentes de celles de l'Assemblée nationale et du Sénat de la République, qui participent à l'exercice de la souveraineté nationale en vertu de l'article 3 de la Constitution ; que doivent être par suite rejetés les moyens tirés d'une rupture d'égalité entre représentants au Parlement européen et parlementaires nationaux.
III - Sur les incompatibilités avec des fonctions professionnelles :
Il y a lieu de déclarer contraires à la Constitution l'article 3, ainsi que les dispositions relatives aux incompatibilités applicables aux fonctions de juge des tribunaux de commerce et des tribunaux mixtes de commerce prévues par les articles 7, 14, 16, 25, 27, 28 et 31 de la loi déférée. En effet, les auteurs des saisines critiquent ces dispositions au motif qu' " édicter une incompatibilité sur l'ensemble du territoire national, et non pas limitée au ressort où sont exercées les fonctions, apparaît disproportionné au regard de l'objectif poursuivi ". Et, selon le Conseil, de telles restrictions doivent être justifiées au regard des exigences découlant de l'article 6 de la Déclaration de 1789, par la nécessité de protéger la liberté de choix de l'électeur, l'indépendance de l'élu ou l'indépendance des juridictions contre les risques de confusion ou de conflits d'intérêts. Or, en l'espèce, les incompatibilités critiquées ne sont pas limitées aux cas où le ressort géographique de la collectivité territoriale coïncide, en tout ou partie, avec celui de la chambre consulaire ou du tribunal de commerce.
IV - Sur l'âge d'éligibilité des représentants au Parlement européen :
Les députés requérants mettent en cause l'atteinte à l'égalité qui résulterait de l'article 20 de la loi déférée, qui réduit à dix-huit ans l'âge d'éligibilité des ressortissants d'un Etat de l'Union européenne autre que la France, pour laquelle l'âge d'éligibilité est de vingt-trois ans conformément à la loi organique relative aux incompatibilités entre mandats électoraux. Le Conseil constitutionnel estime que la discrimination critiquée méconnaît le principe d'égalité et déclare donc l'article 20 de la loi déférée contraire à la Constitution.
V - Sur les dispositions relatives l'outre-mer :
Les sénateurs requérants d'une part, soutiennent que les dispositions du titre IV de la loi déférée, qui prévoit les mesures d'adaptation relatives à l'outre- mer, empiéteraient sur le domaine réservé aux lois organiques par les articles 74 et 77 de la Constitution et dénoncent en outre le " caractère discriminatoire " des dispositions des articles 25 et 27 qui excluent l'exercice des fonctions de maire par le président et les membres des gouvernements de la Polynésie française et de la...

Pour continuer la lecture

SOLLICITEZ VOTRE ESSAI

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT