Saisine du Conseil constitutionnel en date du 21 février 2017 présentée par au moins soixante sénateurs, en application de l'article 61, alinéa 2, de la Constitution, et visée dans la décision n° 2017-747 DC

JurisdictionFrance
Date de publication21 mars 2017
Record NumberJORFTEXT000034228097
Publication au Gazette officielJORF n°0068 du 21 mars 2017
Enactment Date21 février 2017


LOI RELATIVE À L'EXTENSION DU DÉLIT D'ENTRAVE À L'INTERRUPTION VOLONTAIRE DE GROSSESSE


Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les conseillers,
Les sénateurs soussignés ont l'honneur de soumettre à votre examen, conformément au deuxième a1inéa de l'article 61 de la Constitution, la loi relative à l'extension du délit d'entrave à l'interruption volontaire de grossesse, aux fins de déclarer contraire à la Constitution son unique article qui porte atteinte à des principes fondamentaux reconnus par le Conseil constitutionnel.
Ils compléteront, le cas échéant, cette demande dans des délais raisonnables.


1. Sur la contrariété du texte aux principes et objectifs à valeur constitutionnels du droit pénal


L'article unique est contraire aux grands principes qui fondent le droit pénal français et qui découlent de la Constitution et de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.


a) Sur l'atteinte portée par le texte au principe constitutionnel de légalité des délits et des peines


Aux termes de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen : « La Loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu'en vertu d'une Loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée. »
Selon la jurisprudence du Conseil constitutionnel, cette disposition impose tout d'abord au législateur de « fixer lui-même le champ d'application de la loi pénale » (1). Le soin de définir les infractions et les peines qui y sont attachées ne peut échoir au pouvoir réglementaire ou à l'interprétation des magistrats. Ensuite, le législateur doit « définir les infractions en termes suffisamment clairs et précis pour exclure 1'arbitraire » (2) mais également pour éviter « une rigueur non nécessaire lors de la recherche des auteurs d'infraction » (3).
En outre, le législateur est tenu au principe de clarté de la loi pénale, qui découle de l'article 34 de la Constitution et de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ainsi que de l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi, dans le respect des articles 4, 5, 6 et 16 de la Déclaration de 1789, qui lui imposent « d'adopter des dispositions suffisamment précises et des formules non équivoques » (4).
Actuellement, l'infraction définie à l'article L. 2223-2 du code de la santé publique comme le « fait d'empêcher ou de tenter d'empêcher de pratiquer ou de s'informer sur [l'interruption volontaire de grossesse] » se caractérise dans deux hypothèses : la perturbation de l'accès aux établissements ou l'exercice de pressions morales et psychologiques, menaces ou actes d'intimidation.
Le texte déféré par les sénateurs étend l'infraction d'entrave à l'interruption volontaire de grossesse à « la diffusion ou la transmission d'allégations ou d'indications de nature à induire intentionnellement en erreur, dans un but dissuasif ».
Le texte ainsi rédigé fait naître une grande incertitude sur les éléments constitutifs de...

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