Délibération n° 2011-343 du 10 novembre 2011 portant recommandation sur la mise en œuvre par les partis ou groupements à caractère politique, élus ou candidats à des fonctions électives de fichiers dans le cadre de leurs activités politiques

JurisdictionFrance
Publication au Gazette officielJORF n°0290 du 15 décembre 2011
Record NumberJORFTEXT000024968743
Date de publication15 décembre 2011
CourtCOMMISSION NATIONALE DE L'INFORMATIQUE ET DES LIBERTES
Enactment Date10 novembre 2011


La Commission nationale de l'informatique et des libertés,
Vu la convention n° 108 du Conseil de l'Europe du 28 janvier 1981 pour la protection des personnes à l'égard du traitement automatisé des données à caractère personnel ;
Vu la directive 95/46/CE du Parlement européen et du Conseil du 24 octobre 1995 relative à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données ;
Vu la directive 2002/58/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 juillet 2002 concernant le traitement de données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des communications électroniques ;
Vu le code des postes et des communications électroniques, notamment ses articles L. 34 et L. 35-1 ;
Vu le code électoral, notamment son article L. 28 ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, notamment son article 11 ;
Vu le décret n° 2005-1309 du 20 octobre 2005 modifié pris pour l'application de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée ;
Après avoir entendu M. Jean-François Carrez, commissaire, en son rapport et Mme Elisabeth Rolin, commissaire du Gouvernement, en ses observations,
Formule les observations suivantes :
Les partis et groupements à caractère politique, les élus et candidats à des fonctions électives recourent à des traitements de données à caractère personnel dans le cadre de leurs activités. Des fichiers sont ainsi mis en œuvre aux fins de gestion interne de ces organismes, de communication en direction de leurs membres ou correspondants, de prospection (recherche de nouveaux adhérents, de soutiens, de financements, etc.) ainsi que de propagande (en vue d'une élection particulière). Pour des raisons de commodité, ces activités sont regroupées, dans la présente recommandation, sous l'appellation générique de « communication politique » ;
Ces traitements de données personnelles comportent deux spécificités. Ils peuvent tout d'abord porter sur des données faisant apparaître, directement ou indirectement, les opinions politiques des personnes concernées, informations qui bénéficient d'un statut particulier au regard de la loi « informatique et libertés ». En effet, en application de l'article 8 de cette loi, le traitement de telles données est par principe interdit, bien que des exceptions soient expressément prévues, notamment en ce qui concerne certains fichiers mis en œuvre par des organismes politiques ;
En outre, les citoyens se montrent très sensibles sur ces questions, qui relèvent de leur vie privée. La prospection politique, tout particulièrement, est souvent vécue de manière très intrusive par les personnes concernées, comme en témoignent les nombreuses plaintes instruites par la commission en ce domaine ;
Dans ces conditions, il est de la responsabilité de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, conformément à ses missions définies à l'article 11 de la loi du 6 janvier 1978 modifiée, de préciser les modalités selon lesquelles les principes de protection des données à caractère personnel doivent s'appliquer à ces traitements afin de garantir pleinement le respect des droits et libertés des personnes ;
Cette nouvelle recommandation abroge et remplace la délibération n° 2006-228 du 5 octobre 2006. Sa première partie rappelle les principes généraux auxquels doivent se conformer tous les fichiers utilisés aux fins de communication politique et fournit des illustrations pratiques de la portée des obligations qui pèsent sur les responsables de traitement ;
La deuxième partie recense les catégories de fichiers qui peuvent être utilisés dans le cadre d'opérations de communication politique et précise les recommandations spécifiques qui s'attachent à chacun de ces traitements ;
La dernière partie aborde les garanties particulières qui doivent entourer l'utilisation des nouveaux outils de communication utilisés par les partis et groupements politiques, élus et candidats dans le cadre de leurs activités.
Recommande :



I. ― L'application pratique des principes « informatique et libertés »
aux opérations de communication politique


Les rappels pratiques qui suivent sont valables que ces fichiers soient constitués ou utilisés par les groupements politiques (fichier de membre ou fichier loué, par exemple) et quels que soient les modes de communication choisis (voie postale, téléphonique ou électronique).


1. Licéité et loyauté de la collecte


Les partis, élus et candidats constituant ou utilisant des fichiers à des fins de communication politique doivent s'assurer que la collecte des données destinées à les alimenter est licite et loyale au sens de l'article 6 de la loi. La licéité renvoie à la possibilité juridique d'utiliser des informations. La loyauté renvoie à l'information des personnes concernées sur l'utilisation de leurs données. Ces conditions sont valables que la collecte soit effectuée directement auprès des intéressés ou de façon indirecte (coordonnées fournies par un tiers, location de fichier, etc.).
En cas de collecte directe auprès des intéressés, conformément à l'article 32 de la loi du 6 janvier 1978 modifiée, les éléments suivants doivent être fournis aux personnes au moment de la collecte : l'identité de la personne morale ou physique procédant à la collecte, la finalité du fichier constitué à partir des informations collectées, le caractère facultatif des réponses et le rappel des droits d'opposition, d'accès, de rectification et de suppression des données.
La collecte indirecte des informations implique une plus grande prudence pour les partis, élus et candidats, dans la mesure où elle a lieu à l'insu des personnes concernées. Il convient de fournir, dès la première prise de contact avec l'intéressé, les informations prévues à l'article 32 de la loi « informatique et libertés ».
Dans le cadre d'opérations de parrainage, la CNIL recommande d'adresser un seul et unique message (sans relance) au filleul dont le parrain a fourni les coordonnées postales, électroniques ou téléphoniques au parti ou au candidat et d'effacer les données du filleul s'il n'est pas donné suite à l'opération. Ce message devra en outre préciser l'identité du parrain et le fait que, en l'absence de réponse, ces données seront effacées dans un délai approprié.
Les mêmes recommandations s'appliquent lorsque les membres d'un parti ou soutiens d'un candidat fournissent les coordonnées de contacts professionnels ou privés (carnet d'adresses ou répertoire téléphonique). En cas d'utilisation du téléphone, toute communication doit en outre être précédée d'une information des personnes : au début de la communication téléphonique en cas d'appel, par un premier SMS si ce mode de communication est choisi.


2. Choix et respect d'une finalité déterminée


Un fichier constitué à des fins de communication politique ne peut pas être utilisé dans un autre but que celui qui a été initialement défini (article 6 de la loi « informatique et libertés » et article 226-21 du code pénal). Ainsi, un élu ou un candidat ne pourrait utiliser à des fins professionnelles le fichier qu'il a constitué à des fins de communication politique. De même, un ancien candidat ne peut pas utiliser à une autre fin un fichier constitué dans le cadre d'une campagne électorale particulière.


3. Le traitement de données sensibles


Par exception, les fichiers mis en œuvre par les organismes non lucratifs à caractère politique peuvent contenir des données dites sensibles au sens de l'article 8 de la loi. Cette exception est cependant assortie de conditions : ces données ne peuvent correspondre qu'à l'objet de l'organisme (opinions politiques) ; elles ne doivent concerner que les membres de celui-ci ou les personnes qui entretiennent avec lui des contacts réguliers ; elles ne doivent pas être communiquées à des tiers.
Il est interdit de constituer un fichier à partir de tris opérés sur la consonance des noms des personnes. Les partis, élus ou candidats ne peuvent donc pas s'adresser aux représentants réels ou supposés d'une communauté religieuse particulière, par exemple pour leur adresser un message à l'occasion d'une fête religieuse ou les appeler à soutenir tel candidat, issu de telle ou telle communauté.
En cas de publipostage (envoi simultané de courriers électroniques), le responsable de traitement doit veiller à ne pas divulguer à l'ensemble des destinataires les coordonnées électroniques des intéressés.
Les messages adressés à des prospects, quel qu'en soit le support (papier ou électronique), ne doivent contenir aucun signe distinctif faisant apparaître des données sensibles (sur l'enveloppe ou dans leur intitulé).


4. Les droits des personnes concernées


La CNIL instruit de nombreuses plaintes concernant la réception de messages à caractère politique ou les difficultés que les particuliers ou les électeurs rencontrent pour se faire radier des fichiers de communication utilisés. Elle rappelle que toute personne dispose par la loi des droits d'opposition (article 38 : s'opposer au traitement de ses données), d'accès (article 39 : obtenir la communication des informations traitées) et de rectification (article 40 : obtenir la modification des informations périmées, inexactes ou incomplètes).
La commission recommande donc que l'exercice de ces droits soit facilité par les responsables de traitement et que les personnes concernées obtiennent une réponse rapide à leurs demandes (au maximum deux mois).
La présence, sur le support de collecte des données (ou lors du premier contact en cas de collecte indirecte), d'une adresse postale ou électronique dédiée (parti, sous-traitant, permanence, etc.) contribue à faciliter l'exercice de ces droits. Il en va de même de la mise à disposition de formulaires spécifiques.
L'indication explicite de l'origine des données utilisées dans le cadre des mentions d'information constitue également une mesure...

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