Avis n° 21-A-02 du 23 mars 2021 relatif à la liberté d'installation et à des recommandations de créations d'offices d'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation

JurisdictionFrance
Publication au Gazette officielJORF n°0084 du 9 avril 2021
Record NumberJORFTEXT000043339655
Date de publication09 avril 2021
CourtAUTORITE DE LA CONCURRENCE
Enactment Date23 mars 2021


L'Autorité de la concurrence (commission permanente),
Vu le code de commerce, notamment son article L. 462-4-2 ;
Vu la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, notamment son article 57 ;
Vu les ordonnances n° 2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures pendant cette même période et n° 2020-560 du 13 mai 2020 fixant les délais applicables à diverses procédures pendant la période d'urgence sanitaire ;
Vu l'ordonnance n° 2020-318 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles relatives à l'établissement, l'arrêté, l'audit, la revue, l'approbation et la publication des comptes et des autres documents et informations que les personnes morales et entités dépourvues de personnalité morale de droit privé sont tenues de déposer ou publier dans le contexte de l'épidémie de covid-19 ;
Vu le décret n° 2016-215 du 26 février 2016 portant définition des critères prévus pour l'application de l'article L. 462-4-2 du code de commerce ;
Vu le décret n° 2016-652 du 20 mai 2016 modifiant les conditions d'accès à la profession d'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ;
Vu les avis n° 16-A-18 du 10 octobre 2016 et n° 18-A-11 du 25 octobre 2018 relatifs à la liberté d'installation et à des recommandations de créations d'offices d'avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ;
Vu le document de consultation publique mis en ligne par l'Autorité de la concurrence le 9 mars 2020 ; vu le communiqué de presse de l'Autorité de la concurrence du 18 mai 2020, sur la sortie progressive de la période d'urgence sanitaire et la reprise des délais légaux ;
Vu les autres pièces du dossier ;


Les rapporteurs, le rapporteur général adjoint, les représentants du ministère de la justice entendus et le commissaire du Gouvernement lors de la séance du 26 janvier 2021 ;
Le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat, la première présidente et la première avocate générale de la Cour de cassation, le président de l'Ordre des avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, Me Marie-Paule Melka et Me Ludwig Prigent, avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation associés, entendus sur le fondement des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 463-7 du code de commerce,
Est d'avis :


- de recommander la création d'offices d'avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ;
- d'établir un bilan sur l'accès aux offices, et de formuler des recommandations au garde des sceaux, ministre de la justice, afin d'améliorer cet accès,


Sur la base des observations suivantes :


Résumé (1)


En vertu de l'article L. 462-4-2 du code de commerce créé par l'article 57 de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques (« loi Macron »), l'Autorité rend au ministre de la justice, qui en est le garant, un avis sur la liberté d'installation des avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation. Cet avis, émis au moins tous les deux ans, formule également des recommandations pour améliorer l'accès aux offices et permettre une augmentation progressive du nombre d'offices à créer, de manière à ne pas bouleverser les conditions d'activité des offices existants.
L'Autorité a émis deux précédents avis, respectivement publiés au Journal officiel le 1er novembre 2016 et le 1er novembre 2018. Alors que le nombre de 60 offices était resté inchangé depuis 1817, l'Autorité a recommandé de créer, dans son avis de 2016, quatre offices, puis, dans son avis de 2018, quatre nouveaux offices. Quatre offices ont ainsi été créés par arrêté du garde des sceaux le 5 décembre 2016, puis quatre nouveaux offices par arrêté du garde des sceaux le 22 mars 2019, permettant au total à 10 nouveaux avocats aux Conseils de s'installer dans les offices créés. Ces nominations ont largement contribué à l'augmentation du nombre d'avocats aux Conseils ces dernières années, lequel est passé de 112 en 2016 à 125 en 2020.
Après un bref rappel du cadre légal et réglementaire applicable, le présent avis vise à présenter un état des lieux des évolutions de l'offre et de la demande au cours des cinq dernières années ayant une incidence sur cette profession, en prenant tout particulièrement en compte les conséquences de la crise sanitaire survenue en mars 2020, afin d'émettre de nouvelles recommandations quantitatives et qualitatives adaptées à ce contexte exceptionnel. Il est à noter que le contexte d'urgence sanitaire a conduit l'Autorité à suspendre les délais de réponse à la consultation publique prévue à l'article L. 462-4-2 du code de commerce et les parties prenantes à transmettre les données comptables des offices avec un certain retard, ce qui explique le léger décalage du présent avis.
Du point de vue de l'offre, malgré une croissance significative du nombre d'offices et de professionnels depuis 2017, les résultats financiers de la profession sur la période 2015-2019, notamment le taux de résultat, étaient particulièrement élevés.
En 2020, il est probable que ce taux demeure élevé, en dépit de la crise sanitaire actuelle. D'un point de vue conjoncturel, l'Autorité constate certes un impact négatif de la crise sanitaire sur l'activité des avocats aux Conseils, lié à un fort ralentissement des activités juridiques devant les hautes juridictions, notamment lors du premier confinement devant la Cour de cassation. Cependant, les offices ont su s'adapter aux contraintes de cette crise, en abaissant par exemple le nombre des collaborateurs, en ajustant les rémunérations par dossier et en faisant appel aux dispositifs d'aides mises en place par l'Etat.
D'un point de vue plus structurel, les avocats aux Conseils continuent de jouir d'un certain nombre d'atouts : un monopole de représentation devant les hautes juridictions, un recours récurrent aux collaborateurs extérieurs, une liberté tarifaire. Ces atouts leur ont permis de maintenir dans la période écoulée un haut niveau de rentabilité. Aucun office ne paraît donc en difficulté financière. On constate que le dualisme identifié en 2018 entre certains offices très rentables d'une part, et un grand nombre d'offices se trouvant en bas de la distribution de revenus, d'autre part, se maintient. Dans un contexte de faible mobilité d'une partie de la clientèle, la concentration des affaires générant des chiffres d'affaires importants et récurrents auprès des offices bien établis pourrait limiter la perspective de croissance des nouveaux installés à moyen terme.
Du côté de la demande, un ralentissement éphémère a été constaté pendant la période du premier confinement avec une baisse de 5 % devant le Conseil d'Etat et de 12 % devant la Cour de cassation. L'analyse de l'impact de la crise sanitaire permet ainsi de conclure à une baisse moyenne de 8 % de la demande au cours de cette période.
L'analyse fine de leur activité des deux années 2018 et 2019 a permis d'identifier une augmentation nette du nombre d'affaires devant les juridictions administratives du fond et une légère hausse devant le Conseil d'Etat. S'agissant de l'ordre judiciaire, l'activité globale devant les juridictions du fond augmente, tandis que celle devant la Cour de cassation baisse.
En l'état, les perspectives de modification de l'orientation des pourvois devant la Cour de cassation, si elles pouvaient conduire à des ajustements importants dans le mode de traitement des différents types de pourvois, ne devraient pas, à la différence des réformes envisagées par le passé, modifier substantiellement le nombre de pourvois traités par la Cour, ni l'activité des avocats aux Conseils qui en découle. Dès lors, et pour les deux années à venir, on peut prévoir une stabilité de leur activité devant la Cour de cassation. S'agissant du Conseil d'Etat, l'Autorité ne note pas d'évolution de nature à affecter les perspectives d'activité des avocats aux Conseils pour les deux années à venir. Par conséquent, les éléments recueillis permettent de conclure à une relative stabilité de l'activité du Conseil d'Etat et de la Cour de cassation sur cette nouvelle période biennale.
L'Autorité relève enfin que les effectifs de candidats à l'installation restent extrêmement réduits, ce qui limite les perspectives d'évolution du nombre d'avocats aux Conseils dans les deux années à venir.
Ces différentes considérations conduisent l'Autorité à recommander la création de 2 offices d'avocats aux Conseils sur la prochaine période biennale.
Au-delà de ces recommandations quantitatives, l'Autorité relève - avec satisfaction - que plusieurs des recommandations qualitatives qu'elle avait formulées dans ses précédents avis ont été suivies d'effet. Plusieurs textes ont ainsi récemment modifié ou précisé le régime juridique applicable aux avocats aux Conseils, notamment en ce qui concerne la composition du jury d'examen d'aptitude à la profession, la gouvernance et le déroulement de la formation, les règles encadrant la communication et les règles déontologiques de la profession.
Certaines mesures complémentaires pourraient toutefois encore permettre de rendre plus transparentes la sélection et la nomination des candidats aux offices créés ou d'élargir le vivier de candidats.
I. - Introduction
II. - Cadre légal et réglementaire
A. - Présentation générale de la profession
B. - La formation des avocats aux Conseils
C. - Les modifications du régime juridique applicable aux avocats aux Conseils depuis le précédent avis
1. La modification de la composition du jury d'examen d'aptitude à la profession d'avocat aux Conseils
2. La modification de la gouvernance de la formation et du déroulement de la formation
3. Les règles de communication applicables aux avocats aux Conseils
a) Le décret du 29 mars 2019 autorisant la sollicitation personnalisée
b) La modification du règlement général de déontologie
4. La modification des règles de confraternité
D. - Les modalités d'installation et les précédents avis de l'Autorité
1. Le cadre applicable aux...

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