Décision judiciaire de Conseil d'Etat, 31 octobre 2008 (cas Conseil d'État, Section du Contentieux, 31/10/2008, 293785)

Date de Résolution31 octobre 2008
JuridictionCouncil of State (France)
Nature Décision

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 24 mai et 26 septembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la SECTION FRANCAISE DE L'OBSERVATOIRE INTERNATIONAL DES PRISONS, dont le siège est 31, rue des Lilas à Paris (75019), représentée par son président ; la SECTION FRANCAISE DE L'OBSERVATOIRE INTERNATIONAL DES PRISONS demande au Conseil d'Etat :

  1. ) d'annuler le décret n° 2006-338 du 21 mars 2006 modifiant le code de procédure pénale et relatif à l'isolement des détenus ;

  2. ) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le pacte international relatif aux droits civils et politiques ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Richard Senghor, Maître des Requêtes,

- les observations de Me Spinosi, avocat de la SECTION FRANCAISE DE L'OBSERVATOIRE INTERNATIONAL DES PRISONS,

- les conclusions de M. Mattias Guyomar, Commissaire du gouvernement ;

Considérant que si la SECTION FRANCAISE DE L'OBSERVATOIRE INTERNATIONAL DES PRISONS attaque le décret du 21 mars 2006 modifiant le code de procédure pénale et relatif à l'isolement des détenus, elle conteste en particulier son article 1er, qui régit la mesure administrative de mise à l'isolement, et son article 3-II, en tant qu'il définit les conditions dans lesquelles une mesure de mise à l'isolement peut être ordonnée par l'autorité judiciaire ;

Considérant que, d'une part, l'article 1er du décret attaqué a modifié les articles D. 283-1 et D. 283-2 et créé les articles D. 283-1-1 à D. 283-1-10 et D. 282-2-1 à 283-2-4 du code de procédure pénale relatifs à la mesure de mise à l'isolement prise à l'initiative de l'autorité administrative ou, le cas échéant, sur la demande du détenu ; que ces dispositions précisent les conditions dans lesquelles une telle mesure peut être prescrite puis prolongée, ainsi que le régime de détention applicable ; que, d'autre part, l'article 3-II du décret du 21 mars 2006 a notamment créé, au titre des ordres donnés par l'autorité judiciaire dans le cadre de la détention, l'article D. 56-1 du code de procédure pénale ; que celui-ci prévoit les conditions dans lesquelles le magistrat saisi du dossier de l'information judiciaire peut ordonner une mesure de mise à l'isolement ; qu'il précise en particulier que le prévenu concerné se trouve alors placé dans les conditions d'incarcération prévues par les articles D. 283-1-2 à D. 283-1-4 du même code ;

Sur les conclusions dirigées contre l'article 1er du décret attaqué :

Considérant qu'en vertu des dispositions introduites par cet article dans le code de procédure pénale, lorsqu'une mesure d'isolement est prononcée à l'égard d'un détenu, celui-ci se trouve placé seul en cellule ; que sa participation aux promenades et aux activités collectives, y compris de formation et de travail, est en principe prohibée, seuls étant garantis ses droits à l'information, aux visites, à la correspondance et à l'exercice d'un culte ; qu'une mesure d'isolement est prise par le chef d'établissement pour une durée de trois mois renouvelable une fois, puis, le cas échéant, prolongée pour la même durée sur décision du directeur régional des services pénitentiaires, également renouvelable une fois ; qu'au-delà d'un an, seul le garde des sceaux, ministre de la justice, est habilité à proroger cette mesure, par période de quatre mois, pendant une année supplémentaire ; qu'au-delà de deux ans, sa reconduction ne peut intervenir que dans des circonstances exceptionnelles nécessitant une motivation spéciale ;

En ce qui concerne la compétence de l'auteur du décret :

Considérant qu'aux termes de l'article 728 du code de procédure pénale : Un décret détermine l'organisation et le régime intérieur des établissements pénitentiaires ; que si l'association requérante soutient qu'en se fondant sur cette disposition pour instituer un régime de mise à l'isolement, le pouvoir réglementaire a méconnu l'article 34 de la Constitution en vertu duquel seul le législateur est compétent pour fixer les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques, il n'appartient pas, en tout état de cause, au Conseil d'Etat, statuant au contentieux d'apprécier la conformité à la Constitution de ces dispositions législatives ; que la mesure administrative de mise à l'isolement prévue par l'article 1er du décret attaqué relève...

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