Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 8 décembre 2021, 20-13.905, Publié au bulletin

Presiding JudgeM. Huglo (conseiller doyen faisant fonction de président)
ECLIECLI:FR:CCASS:2021:SO01409
CitationSur la détermination des domaines d'application respectifs du règlement (CE) n° 1346/2000 du Conseil du 29 mai 2000 et du règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000, à rapprocher : Soc., 28 octobre 2015, pourvoi n° 14-21.319, Bull. 2015, V, n° 213 (rejet), et les arrêts cités.
Case OutcomeCassation partielle
Subject MatterPRUD'HOMMES - Compétence - Compétence matérielle - Litiges nés à l'occasion du contrat de travail - Procédure d'insolvabilité ouverte dans un Etat membre de l'Union européenne - Violation du droit au transfert du contrat de travail du salarié - Action dérivant directement de la procédure d'insolvabilité (non) - Mise en oeuvre du règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000 - Portée
Date08 décembre 2021
Docket Number20-13905
CounselSCP Thouvenin,Coudray et Grévy,SCP Célice,Texidor,Périer
Appeal Number52101409
CourtChambre Sociale (Cour de Cassation de France)
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

ZB


COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 8 décembre 2021




Cassation partielle


M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président



Arrêt n° 1409 F-B

Pourvoi n° C 20-13.905



R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 8 DÉCEMBRE 2021

M. [U] [P], domicilié [Adresse 3], a formé le pourvoi n° C 20-13.905 contre l'arrêt rendu le 5 novembre 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 11), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société BGC Brokers LP, dont le siège est [Adresse 6] (Royaume-Uni),

2°/ à la société MEQ Realisations Limited, dont le siège est [Adresse 7] (Royaume-Uni), anciennement dénommée Mint equities limited,

3°/ à M. [B] [W], domicilié [Adresse 4], associé de la société Patnerships Price Waterhouse Coopers LLP, pris en qualité d'administrateur judiciaire de la société MEQ Realisations Limited, anciennement dénommée Mint Equities Limited,

4°/ à la société MJA, dont le siège est [Adresse 1], pris en la personne de Mme [H] [R], en qualité de mandataire liquidateur judiciaire de la société MEQ Realisations Limited, anciennement dénommée Mint Equities Limited ,

5°/ à l'AGS CGEA Ile-de-France Ouest, dont le siège est [Adresse 2],

défendeurs à la cassation.
La société MEQ Realisations Limited et M. [W] ont formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt

Les demandeurs aux pourvois incidents invoquent, à l'appui de leur recours, le moyen unique de cassation également annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Le Masne de Chermont, conseiller référendaire, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [P], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société MEQ Realisations Limited et de M. [W], après débats en l'audience publique du 20 octobre 2021 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Le Masne de Chermont, conseiller référendaire rapporteur, Mme Ott, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 5 novembre 2019), la société Mint Equities Limited, devenue la société MEQ Realisations Limited, établie à [Localité 5] (Royaume-Uni) et ayant une activité de courtage sur instruments financiers pour le compte de tiers, a engagé M. [P], à compter du 1er avril 2010, pour exercer des fonctions de courtier sur le site de sa succursale parisienne.

2. Saisie par les dirigeants de la société Mint Equities Limited, la High Court of Justice, Chancery Division, Companies Court (Royaume-Uni) a, par ordonnance du 19 août 2010, rendue sur le fondement de l'Insolvency Act 1986, désigné MM. [W] et [Y], du cabinet PricewaterhouseCoppers LLP, comme « administrators » de cette société, rejeté la requête en liquidation (« winding-up Petition ») présentée par la société Base Interiors Limited et s'est dite convaincue, aux fins de l'application de l'article 3 du règlement (CE) n° 1346/2000 du Conseil, du 29 mai 2000, relatif aux procédures d'insolvabilité, que le centre des intérêts principaux de la société Mint Equities Limited est en Angleterre et au Pays de Galles.

3. Par acte du 19 août 2010, les sociétés Mint Parteners Limited (« in administration ») et Mint Equities Limited (« in administration »), représentées par MM. [W] et [Y] en qualité d'« administrators » ont cédé, dans le cadre d'un accord « pre-pack », à la société BGC Brokers LP leur activité et certains éléments d'actif, à l'exclusion de l'activité menée depuis la France et des éléments d'actif situés en France. Tout en prévoyant le transfert des contrats de travail des salariés employés au Royaume-Uni, à Dubaï et en Suisse, cet acte excluait expressément la reprise du contrat de travail de M. [P].

4. Saisi par MM. [W] et [Y] en qualité d'« administrators », le tribunal de commerce de Paris a, par jugement en date du 28 octobre 2010, ouvert une procédure secondaire de liquidation judiciaire à l'égard de la société Mint Equities Limited et désigné la société MJA, prise en la personne de Mme [R], en qualité de mandataire judiciaire liquidateur.

5. M. [P] a été licencié pour motif économique par lettre du 12 novembre 2010.

Examen des moyens

Sur le second moyen du pourvoi principal et le moyen unique du pourvoi incident, ci-après annexés

6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

7. Le salarié fait grief à l'arrêt de déclarer la juridiction prud'homale incompétente pour connaître de son action fondée sur le transfert du contrat de travail et de renvoyer les parties à mieux se pourvoir, alors « que la Cour de justice de l'Union européenne a jugé (CJUE, 4 sept. 2014, [I], aff. C-157/13, 9 nov. 2017, [G], aff. C-641/16, 20 déc. 2017, [F], aff. C-649/16, 6 fév. 2019, NK, aff. C-535/17, 18 sept. 2019, [E], aff. C-47/18) que seules les actions qui dérivent directement d'une procédure d'insolvabilité et qui s'y insèrent étroitement entrent dans le champ d'application du règlement (CE) n° 1346/2000 du Conseil, du 29 mai 2000, relatif aux procédures d'insolvabilité, que l'élément déterminant pour identifier le domaine dont relève une action est non pas le contexte procédural dans lequel elle s'inscrit cette action, mais le fondement juridique de cette dernière et que selon cette approche, il convient de rechercher si le droit ou l'obligation qui sert de base à l'action trouve sa source dans les règles communes du droit civil et commercial ou dans des règles dérogatoires, spécifiques aux procédures d'insolvabilité ; que, d'autre part, la Cour de cassation a jugé (Soc., 28 oct. 2015, n° 14-21.319) que le litige relatif à la rupture du contrat de travail du salarié et aux créances salariales durant la relation de travail ne relève pas de la procédure d'insolvabilité, ainsi que cela résulte des articles 4 et 10 du règlement CE n° 1346/2000, et que la compétence juridictionnelle pour connaître d'un tel litige doit être déterminée en application de l'article 19 du règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale ; qu'il en résulte, en l'espèce, que l'action du salarié en paiement de diverses sommes pour licenciement sans cause réelle et sérieuse pour être intervenu en violation de la directive n° 2001/23/CE du Conseil du 12 mars 2001 et de l'article L. 1224-1 du code du travail ne trouvait pas son fondement juridique dans des règles spécifiques aux procédures d'insolvabilité et, par conséquent, ne relevait pas de la compétence du tribunal anglais ayant ouvert la procédure d'insolvabilité ; que dès lors, en infirmant le jugement en ce qu'il avait reconnu, sur le fondement du lieu d'exécution du contrat de travail en France, la compétence du conseil des prud'hommes pour connaître de l'action du salarié tirée de la violation du droit au transfert de son contrat de travail à la société BGC Brokers, la cour d'appel a violé les articles 4 et 10 du règlement (CE) n° 1346/2000 relatif aux procédures d'insolvabilité, ensemble l'article 19 du règlement (CE) n° 44/2001...

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