Conseil d'État, 6ème - 5ème chambres réunies, 17/01/2024, 466052, Inédit au recueil Lebon

Record NumberCETATEXT000048973530
Date17 janvier 2024
Judgement Number466052
CourtCouncil of State (France)
Vu les procédures suivantes :

1) Sous le n° 466052, par une requête, enregistrée le 25 juillet 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le Groupe d'information et de soutien des immigré.e.s (GISTI) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2022-899 du 17 juin 2022 relatif au certificat de nationalité française ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



2) Sous le n° 466116, par une requête, enregistrée le 26 juillet 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le Conseil national des barreaux (CNB) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2022-899 du 17 juin 2022 relatif au certificat de nationalité française ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



....................................................................................

3) Sous le n° 466700, par une requête, enregistrée le 16 août 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association Avocats pour la défense des droits des étrangers (ADDE) et le Syndicat des avocats de France demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2022-899 du 17 juin 2022 relatif au certificat de nationalité française ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.



....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :
- la Constitution, notamment son article 34 ;
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code civil ;
- le code de procédure civile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- la décision du Conseil constitutionnel n° 2021-293 L du 15 avril 2021 ;
- le code de justice administrative ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. David Gaudillère, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Maïlys Lange, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Piwnica et Molinié, avocat du Conseil national des barreaux et à la SCP Sevaux, Mathonnet, avocat de l'association Avocats pour la défense des droits des étrangers et autre ;

Vu les notes en délibéré, enregistrées le 18 décembre 2023, présentées par le garde des sceaux, ministre de la justice ;




Considérant ce qui suit :

1. Par trois requêtes qu'il y a lieu de joindre pour statuer par une seule décision, le Groupe d'information et de soutien des immigré.e.s (GISTI), le Conseil national des barreaux (CNB), ainsi que l'association Avocats pour la défense des droits des étrangers (ADDE) et le Syndicat des avocats de France demandent l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 17 juin 2022 relatif au certificat de nationalité française.

Sur la consultation du Conseil d'Etat :

2. Il ressort des pièces du dossier, notamment de la copie de la minute de la délibération de la section de l'intérieur du Conseil d'Etat, produite par le garde des sceaux, ministre de la justice, que le texte du décret attaqué ne contient pas de disposition qui différerait à la fois du texte soumis au Conseil d'Etat et du texte adopté par lui. Le moyen tiré de ce que l'ordonnance attaquée aurait été prise sans consultation régulière du Conseil d'Etat ne peut, par suite, qu'être écarté.

Sur les moyens relatifs à la procédure d'examen des demandes de certificat de nationalité française :

3. En premier lieu, le nouvel article 1045-1 du code de procédure civile, introduit par le décret attaqué, prévoit que la demande de certificat de nationalité doit être accompagnée de l'indication d'une adresse électronique à laquelle sont valablement adressés au demandeur les communications du greffe et le récépissé constatant la réception de toutes les pièces nécessaires à l'instruction de la demande. Il prévoit également qu'en cas de refus de délivrance du certificat demandé, ce refus est notifié par courrier électronique, à l'adresse de courrier électronique déclarée dans la demande.

4. S'il était loisible au pouvoir réglementaire de prévoir la communication par l'administration d'informations et de documents par voie électronique, il lui incombait de prévoir les dispositions nécessaires pour que les personnes qui ne disposent pas d'un accès aux outils numériques ou qui rencontrent des difficultés dans leur maniement puissent bénéficier d'une solution de substitution afin de mener à bien la procédure d'examen de leurs demandes de certificat de nationalité française et de pouvoir recevoir, dans ce cadre, les envois de l'administration.

5. Dès lors, en exigeant d'un demandeur de certificat de nationalité qu'il indique une adresse électronique pour la réception des informations et documents qui lui seront communiqués par le greffe du tribunal judiciaire ou de la chambre de proximité, sans prévoir, à titre de solution de substitution, la possibilité, pour le demandeur qui établit qu'il n'est pas en mesure d'accéder à une messagerie électronique pour la réception de ces informations et documents, d'indiquer une adresse postale, le décret attaqué fait obstacle à l'accès normal des usagers au service public et porte atteinte à l'exercice effectif de leurs droits par les personnes concernées. Par suite, les requérants sont fondés à demander son annulation sur ce point.

6. En deuxième lieu, le même article 1045-1 du code de procédure civile...

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