Conseil d'État, 3ème - 8ème chambres réunies, 08/11/2021, 451264, Inédit au recueil Lebon

Date08 novembre 2021
Record NumberCETATEXT000044310577
Judgement Number451264
CourtCouncil of State (France)

Vu la procédure suivante :

Par une décision n° 388649 du 7 février 2020, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a, en premier lieu, annulé la décision implicite par laquelle le Premier ministre a rejeté la demande tendant, d'une part, à l'abrogation du a) du 2° de l'article D. 531-2 du code de l'environnement et, d'autre part, à ce qu'il prononce un moratoire sur les variétés rendues tolérantes aux herbicides, en deuxième lieu, enjoint au Premier ministre, dans un délai de six mois à compter de la notification de la décision, de modifier le a) du 2° de l'article D. 531-2 du code de l'environnement, en fixant par décret pris après avis du Haut Conseil des biotechnologies, la liste limitative des techniques ou méthodes de mutagenèse traditionnellement utilisées pour diverses applications et dont la sécurité est avérée depuis longtemps, en troisième lieu, enjoint aux autorités compétentes d'identifier, dans un délai de neuf mois à compter de la notification de la présente décision, au sein du catalogue commun des variétés des espèces de plantes agricoles, celles des variétés, en particulier parmi les variétés rendues tolérantes aux herbicides (VRTH), qui y auraient été inscrites sans que soit conduite l'évaluation à laquelle elles auraient dû être soumises compte tenu de la technique ayant permis de les obtenir et d'apprécier, s'agissant des variétés ainsi identifiées, s'il y a lieu de faire application des dispositions du 2 de l'article 14 de la directive 2002/53/CE du 13 juin 2002 et des articles L. 535-6 et L. 535-7 du code de l'environnement, en quatrième lieu, enjoint, dans un délai de six mois à compter de la notification de la décision au Premier ministre et au ministre de l'agriculture et de l'alimentation de prendre les mesures nécessaires à la mise en œuvre des recommandations formulées par l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) dans son avis du 26 novembre 2019, en matière d'évaluation des risques liés aux VRTH, ou de prendre toute autre mesure équivalente de nature à répondre aux observations de l'agence sur les lacunes des données actuellement disponibles et, en cinquième lieu, enjoint au Premier ministre de mettre en œuvre la procédure prévue par le 2 de l'article 16 de la directive 2002/53/CE du 13 juin 2002, pour être autorisé à prescrire des conditions de culture appropriées pour les VRTH issues de la mutagénèse utilisées en France.

Par une requête en mesure d'exécution et d'astreinte concernant la modification de l'article D. 531-2 du code de l'environnement et un mémoire complémentaire, enregistrés les 12 octobre 2020 et 31 janvier 2021 au secrétariat de la section du rapport et des études du Conseil d'Etat, ainsi que par deux autres mémoires, enregistrés au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat les 31 août et 9 octobre 2021, la Confédération Paysanne, le Réseau Semences Paysannes, Les Amis de la Terre France, le Collectif Vigilance OGM et Pesticides 16, Vigilance OG2M, CSFV 49, OGM Dangers, Vigilance OGM 33 et Fédération Nature et Progrès demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'engager en toute urgence la phase administrative de la procédure et la réduire à la durée la plus brève possible compte tenu des enjeux ;

2°) de condamner l'Etat à verser une astreinte de 10 000 euros par jour de retard pour chacun des requérants ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à leur verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La section du rapport et des études du Conseil d'Etat a exécuté les diligences qui lui incombent en vertu de l'article R. 931-4 du code de justice administrative et le président de cette section a transmis la demande d'exécution au président de la section du contentieux.

Par une ordonnance n° 451264 du 6 avril 2021, le président de la section du contentieux a décidé l'ouverture d'une procédure juridictionnelle.

La note que le président de la section du rapport et des études a adressée au président de la section du contentieux a été communiquée aux parties en application des dispositions de l'article R. 931-5 du code de justice administrative.

Par un mémoire, enregistré le 6 janvier 2021 au secrétariat de la section du rapport et des études du Conseil d'Etat, et deux autres mémoires, enregistrés les 28 mai et 7 octobre 2021 au secrétariat de la section du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation demande au Conseil d'Etat de constater que le Gouvernement a opéré l'ensemble des diligences qu'impliquait la mise en œuvre des injonctions édictées par la décision du 7 février 2020 et de ne pas prononcer d'astreinte.

Par des mémoires, enregistrés les 16 juin et 17 septembre 2021, la Fédération française des producteurs d'oléagineux et de protéagineux demande au Conseil d'Etat, d'une part, de reconnaître que l'Etat a mis en œuvre l'article 2 de la décision du 7 février 2020 en notifiant à la Commission, comme l'exige la directive 2015/1535/UE, un projet de décret clarifiant la liste des techniques de mutagénèse exemptées de la réglementation des organismes génétiquement modifiés et que l'adoption de ce décret a été empêchée par la primauté du droit de l'Union, au regard notamment des avis circonstanciés de la Commission et de cinq Etats membres, ainsi que par l'étude de la Commission sur les nouvelles techniques génomiques et le rapport préliminaire de l'Agence européenne de sécurité des aliments (EFSA), qui constituent des changements de circonstance en fait et en droit et, d'autre part, de préciser le sens et la portée de l'article 2 de la décision du 7 février 2020, pour que la mutagénèse aléatoire in vitro continue d'être exemptée de la réglementation des organismes génétiquement modifiés et qu'à tout le moins une éventuelle injonction puisse être mise en œuvre dans le respect du droit de l'Union. A titre subsidiaire, la Fédération française des producteurs d'oléagineux et de protéagineux demande au Conseil d'Etat de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle.



Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
- la directive 2001/18/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 mars 2001 ;
- la directive 2002/53/CE du Conseil du 13 juin 2002 ;
- la directive 2015/1535/UE du Parlement européen et du Conseil du 9 septembre 2015 ;
- l'arrêt C-528/16 de la Cour de justice de l'Union européenne du 25 juillet 2018 ;
- le code rural et de la pêche maritime ;
- le code de l'environnement ;
- la loi n° 2020-1674 du 24 décembre 2020 ;
- le décret n° 2020-1265 du 16 octobre 2020 ;
- le code de justice administrative ;



Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Géraud Sajust de Bergues, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Laurent Cytermann, rapporteur public ;




Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 911-5 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'une décision rendue par une juridiction administrative, le Conseil d'Etat peut, même d'office, prononcer une astreinte contre les personnes morales de droit public ou les organismes de droit privé chargés de la gestion d'un service public pour assurer l'exécution de cette décision ".

2. Par une décision n° 388649 du 7 février 2020, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a, en premier lieu, annulé la décision implicite par laquelle le Premier ministre a rejeté la demande tendant, d'une part, à l'abrogation du a) du 2° de l'article D. 531-2 du code de l'environnement et, d'autre part, à ce qu'il prononce un moratoire sur les variétés rendues tolérantes aux herbicides (article 1er), en deuxième lieu, enjoint au Premier ministre, dans un délai de six mois à compter de la notification de la décision, de modifier le a) du 2° de l'article D. 531-2 du code de l'environnement, en fixant par décret pris après avis du Haut Conseil des biotechnologies, la liste limitative des techniques ou méthodes de mutagenèse traditionnellement utilisées pour diverses applications et dont la sécurité est avérée depuis longtemps (article 2), en troisième lieu, enjoint aux autorités compétentes d'identifier, dans un délai de neuf mois à compter de la notification de la...

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