Tribunal de grande instance de Paris, 22 mars 2022, 18/4575

Docket Number18/4575
Date22 mars 2022
CourtTribunal de Grande Instance de Paris (France)
TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS



3ème chambre
3ème section


No RG 18/04575 -
No Portalis 352J-W-B7C-CMYBJ

No MINUTE :




Assignation du :
10 avril 2018









JUGEMENT
rendu le 22 mars 2022
DEMANDERESSE

Société JET METAL TECHNOLOGIES
[Adresse 2]
[Localité 3]

représentée par Maître Sonia-Maïa GRISLAIN, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #A0035 et par Maître Nicolas MARTIN-TEILLARD, avocat au barreau de LYON, avocat plaidant


DÉFENDERESSES

Société INFOPE INVESTISSEMENT FORMULATION PEINTURE
[Adresse 1]
[Adresse 8]
[Localité 4]

S.A.S. FLUIDEMAIL
[Adresse 7]
[Localité 5]

représentées par Maître Francine TOUCHARD VONTRAT de la SELEURL FTO AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #B0838

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Nathalie SABOTIER, 1ère vice-présidente adjointe
Arthur COURILLON-HAVY, juge
Alix FLEURIET, juge

assisté de Lorine MILLE, greffière,

DÉBATS

A l'audience du 10 novembre 2021 tenue en audience publique devant Nathalie SABOTIER et Arthur COURILLON-HAVY, juges rapporteurs, qui, sans opposition des avocats, ont tenu seuls l'audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en ont rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l'article 805 du Code de Procédure Civile. Avis a été donné aux avocats que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 25 janvier 2022, prorogée au 22 mars 2022.

JUGEMENT

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort

____________________________

Exposé du litige

1.La société Jet métal technologies (ci-après « Jet métal »), spécialisée dans les revêtements métalliques, reproche aux sociétés Infope investissement formulation peinture (ci-après « Infope ») et Fluidémail de vendre des produits de métallisation en préconisant et décrivant auprès de leurs clients l'emploi d'un procédé contrefaisant deux brevets dont elle est titulaire, et par des moyens qu'elle qualifie de concurrence déloyale et parasitaire. Les défenderesses contestent la validité de ses brevets.

2.Elle est ainsi titulaire :

- d'un brevet français intitulé « Procédé non électrolytique de métallisation en ligne de substrats par projection avec traitement de surface préalable et dispositif pour la mise en oeuvre de ce procédé », dont la demande a été déposée le 30 juillet 2008, enregistrée sous le no FR 0855262 et publiée (le 5 février 2010) sous le no FR 2 934 609, brevet délivré le 22 juillet 2011 (ci-après le brevet FR 609) ; et

- d'un brevet européen du même nom, désignant la France, issu d'une demande internationale no PCT/ EP2009/ 059889 déposée le 30 juillet 2009 (publiée le 4 février 2010 sous le no WO 2010/012810) sous priorité de la demande française 0855262, et publiée en Europe sous le no EP 2 326 747 (le 1er juin 2011), brevet européen délivré le 11 mars 2015 (ci-après le brevet EP 747) ;

lesquels brevets sont régulièrement maintenus en vigueur par le paiement des annuités.

3.Après une saisie-contrefaçon pratiquée le 14 mars 2018 sur autorisation du 9 février, la société Jet métal a assigné le 10 avril 2018 les sociétés Infope et Fluidémail (ainsi que le 18 avril, des sociétés du groupe Carbon, ancien client devenu client des défenderesses, mais envers qui elle s'est ensuite désistée) en contrefaçon des deux brevets, et concurrence déloyale et parasitaire.

4.Dans ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 19 mai 2021, la société Jet métal s'oppose aux demandes reconventionnelles en nullité des saisie-contrefaçon, et demande elle-même :
?Invoquant la contrefaçon des revendications 1, 2, 4, 6, 8, 9, 10, 12, 13, 14 du brevet FR 609, et des revendications 1, 2, 3, 4, 5, 8, 9, 10 du brevet « EP232674 », de
?Interdire aux sociétés Fluidémail et Infope, en substance, de contrefaire le brevet français no 08 55262 et le brevet international PCT/EP2009/059889, sous astreinte définitive de 1 500 euros par produit contrefaisant fabriqué et/ou commercialisé,
?Condamner ces sociétés à lui verser les sommes à parfaire de 500 000 euros pour le manque à gagner, 250 000 euros pour les pertes subies et 50 000 euros pour le préjudice moral au titre des actes de contrefaçon,
?Invoquant des actes de concurrence déloyale et de parasitisme, de
?Condamner les mêmes sociétés à lui verser « chacune les sommes à parfaire de 100 000 euros au titre des actes de concurrence déloyale, 100 000 euros à titre de parasitisme et de 50 000 euros pour l'atteinte à son image,
?À titre subsidiaire, une expertise aux frais avancés des sociétés défenderesses, pour « évaluer l'influence de la méthode de pulvérisation des solutions d'oxydoréduction (aérosol ou pas d'aérosol) sur le rendement de la métallisation ainsi que sur l'aspect des pièces métallisées »
? et en tout état de cause,
?la publication du jugement dans 5 journaux et sur les sites internet des défenderesses,
?enjoindre aux défenderesses de lui communiquer « des documents comptables certifiés permettant de déterminer les quantités exactes de produits et les documents techniques relatifs au procédé contrefait, importés, commandés, reçus, livrés et vendus » par elles, sous astreinte de 500 euros,
?outre 70 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, les dépens y-compris les frais relatifs aux opérations de saisie-contrefaçon et de constat, et l'exécution provisoire.


5.Dans leurs dernières conclusions signifiées par voie électronique le 12 mai 2021, les sociétés Fluidémail et Infope résistent aux prétentions adverses et demandent elles-mêmes de :
?annuler les procès-verbaux des saisies-contrefaçon du 14 mars 2018 pratiquées respectivement dans les locaux du siège et de l'établissement secondaire de la société Fluidémail,
?« Ecarter des débats comme dépourvus de toute valeur probante, les procès-verbaux de saisie-contrefaçon ainsi dressés le 14 mars 2018, et, à tout le moins, les pièces de la société Jet metal technologies no 5B et les annexes au PV de saisie-contrefaçon communiquées sous le no 7.2 »
?annuler le brevet FR 609, entièrement (pour insuffisance de description), subsidiairement en annuler les revendications 1 à 12 (pour extension indue), plus subsidiairement les revendications 1, 2, 4, 6, 12 (pour défaut d'activité inventive) ;
?annuler la partie française du brevet européen EP 747 (pour insuffisance de description), « en tout état de cause » ses revendications 1 à 5, 8, 9 et 10 (pour défaut d'activité inventive),
?condamner la société Jet metal technologies à leur payer 200 000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive « et vexatoire »,
?ainsi que
?l'inscription du jugement au registre national des brevets,
?sa publication sur le site internet de la demanderesse,
?100 000 euros à chacune d'elles au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre 468,09 euros à la société Fluidémail pour le cout d'un constat d'huissier, ainsi que les dépens avec recouvrement par leur avocat.


6.L'instruction a été close le 20 mai 2021, l'affaire plaidée le 10 novembre et le jugement mis en délibéré.

MOTIFS

7.La demande tendant à voir écarter des pièces pour défaut de valeur probante est un moyen tendant au rejet des prétentions adverses, et sera examiné en tant que tel.

1) Sur la validité des procès-verbaux de saisie-contrefaçon

Moyens des parties

8.Les sociétés Infope et Fluidémail estiment les procès-verbal de saisie-contrefaçon nuls en ce que :
- l'ordonnance autorisant chaque saisie n'aurait pas été signifiée avant le début des opérations, la lecture préalable ne valant pas remise d'une copie comme l'exige le texte et l'absence de communication du procès-verbal de signification de ces ordonnances laissant supposer que ces significations ont été opérées de manière irrégulière, selon elles ;

- les procès-verbaux de ces saisies ne leur ont pas été laissés immédiatement après la clôture des opérations, alors que les ordonnances ne prévoyaient pas de délai et que le présent tribunal a déjà jugé qu'à défaut, le procès-verbal doit être « laissé » avant que l'huissier quitte les lieux ; et que les pièces annexées à ces procès-verbaux étaient dépourvues du cachet de l'huissier permettant d'attester de ce qu'il s'agissait bien des pièces saisies, et n'étaient pas accompagnées d'une liste ou d'un bordereau ; ce qui les aurait empêchées d'identifier les pièces rapidement et de solliciter la mise sous séquestre de documents portant sur les formulations de peintures et vernis, qu'elles estiment confidentiels ;

- enfin, l'huissier, dans chaque saisie, aurait posé un grand nombre de questions sur les procédés préconisés par les défenderesses (et qui plus est, dans la saisie faite au Perray, en exhibant un document (5B) sans autorisation), au lieu de se contenter de décrire ce qu'il voyait, et avant même de procéder à cette description ; de sorte qu'il aurait outrepassé sa mission, ce qui serait une irrégularité de fond justifiant la nullité des deux procès-verbaux.

9.La société Jet métal soutient que les ordonnances et requêtes ont été signifiées comme l'indiqueraient les procès-verbaux ; qu'aucun texte ne prévoirait une nullité de la saisie-contrefaçon au-delà d'un certain délai de remise du procès-verbal, et que celui-ci a en l'espèce été remis moins de 48 heures après l'accomplissement de chaque saisie ; que les huissiers auraient valablement posé des questions nécessaires dès lors qu'elles poursuivaient l'objectif de découvrir la matérialité et l'étendue de la contrefaçon, et pouvaient présenter le document 5B dès lors qu'il s'agissait d'une pièce présentée à l'appui des requêtes en saisie-contrefaçon ; outre qu'aucun texte ne prévoirait encore de nullité à ce titre, estime-t-elle.

Réponse du tribunal

a. remise préalable de la copie de l'ordonnance

10.En application de l'article R. 615-2-1 du code de la propriété intellectuelle, à peine de nullité et de dommages-intérêts contre l'huissier, celui-ci doit, avant de procéder à la saisie, donner copie, aux détenteurs des objets saisis ou décrits, de l'ordonnance et, le cas échéant, de l'acte constatant la constitution...

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