Décision 2023-858 DC - Loi pour le plein emploi, 14-12-2023

ECLIECLI:FR:CC:2023:2023.858.DC
Case OutcomeNon conformité partielle - réserve
Docket NumberCSCL2334473S
Record NumberCONSTEXT000048796412
Appeal Number2023-858
CourtConstitutional Council (France)
Date14 décembre 2023
Publication au Gazette officielJORF n°0293 du 19 décembre 2023, texte n° 4
Procedure TypeDC04
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 61 de la Constitution, de la loi pour le plein emploi, sous le n° 2023-858 DC, le 16 novembre 2023, par Mmes Mathilde PANOT, Nadège ABOMANGOLI, MM. Laurent ALEXANDRE, Gabriel AMARD, Mmes Ségolène AMIOT, Farida AMRANI, M. Rodrigo ARENAS, Mme Clémentine AUTAIN, MM. Ugo BERNALICIS, Christophe BEX, Carlos Martens BILONGO, Manuel BOMPARD, Idir BOUMERTIT, Louis BOYARD, Aymeric CARON, Sylvain CARRIÈRE, Florian CHAUCHE, Mme Sophia CHIKIROU, MM. Hadrien CLOUET, Éric COQUEREL, Alexis CORBIÈRE, Jean-François COULOMME, Mme Catherine COUTURIER, MM. Hendrik DAVI, Sébastien DELOGU, Mmes Alma DUFOUR, Karen ERODI, Martine ÉTIENNE, M. Emmanuel FERNANDES, Mmes Sylvie FERRER, Caroline FIAT, M. Perceval GAILLARD, Mmes Raquel GARRIDO, Clémence GUETTÉ, M. David GUIRAUD, Mmes Mathilde HIGNET, Rachel KEKE, MM. Andy KERBRAT, Bastien LACHAUD, Maxime LAISNEY, Arnaud LE GALL, Antoine LÉAUMENT, Mmes Élise LEBOUCHER, Charlotte LEDUC, M. Jérôme LEGAVRE, Mmes Sarah LEGRAIN, Murielle LEPVRAUD, Pascale MARTIN, Élisa MARTIN, MM. William MARTINET, Frédéric MATHIEU, Damien MAUDET, Mmes Marianne MAXIMI, Manon MEUNIER, M. Jean-Philippe NILOR, Mmes Danièle OBONO, Nathalie OZIOL, MM. François PIQUEMAL, Thomas PORTES, Loïc PRUD’HOMME, Adrien QUATENNENS, Jean-Hugues RATENON, Sébastien ROME, François RUFFIN, Aurélien SAINTOUL, Michel SALA, Mmes Danielle SIMONNET, Ersilia SOUDAIS, Anne STAMBACH-TERRENOIR, Andrée TAURINYA, M. Matthias TAVEL, Mme Aurélie TROUVÉ, MM. Paul VANNIER, Léo WALTER, René PILATO, Boris VALLAUD, Joël AVIRAGNET, Christian BAPTISTE, Mme Marie-Noëlle BATTISTEL, MM. Mickaël BOULOUX, Philippe BRUN, Elie CALIFER, Alain DAVID, Arthur DELAPORTE, Stéphane DELAUTRETTE, Inaki ECHANIZ, Olivier FAURE, Guillaume GAROT, Jérôme GUEDJ, Johnny HAJJAR, Mmes Chantal JOURDAN, Marietta KARAMANLI, Fatiha KELOUA HACHI, MM. Philippe NAILLET, Bertrand PETIT, Mmes Mélanie THOMIN, Cécile UNTERMAIER, M. Roger VICOT, Mmes Anna PIC, Christine PIRÈS BEAUNE, Claudia ROUAUX, MM. Hervé SAULIGNAC, André CHASSAIGNE, Mme Soumya BOUROUAHA, M. Pierre DHARRÉVILLE, Mme Elsa FAUCILLON, MM. Sébastien JUMEL, Jean-Paul LECOQ, Yannick MONNET, Stéphane PEU, Fabien ROUSSEL, Nicolas SANSU, Jean-Marc TELLIER, Hubert WULFRANC, Jean-Victor CASTOR, Steve CHAILLOUX, Mmes Émeline K BIDI, Karine LEBON, MM. Tematai LE GAYIC, Frédéric MAILLOT, Marcellin NADEAU, Mme Mereana REID ARBELOT, MM. Davy RIMANE, Jiovanny WILLIAM, Mmes Cyrielle CHATELAIN, Christine ARRIGHI, M. Julien BAYOU, Mme Lisa BELLUCO, MM. Karim BEN CHEIKH, Charles FOURNIER, Mme Marie-Charlotte GARIN, MM. Jérémie IORDANOFF, Hubert JULIEN-LAFERRIÈRE, Mme Julie LAERNOES, M. Benjamin LUCAS, Mme Francesca PASQUINI, M. Sébastien PEYTAVIE, Mme Marie POCHON, M. Jean-Claude RAUX, Mmes Sandra REGOL, Sandrine ROUSSEAU, Eva SAS, Sabrina SEBAIHI, M. Aurélien TACHÉ, Mme Sophie TAILLÉ-POLIAN, MM. Nicolas THIERRY, Bertrand PANCHER, Jean-Louis BRICOUT, Charles de COURSON, Mme Martine FROGER, MM. Paul MOLAC, Benjamin SAINT-HUILE, David TAUPIAC et Stéphane LENORMAND, députés.


Au vu des textes suivants :
- la Constitution ;
- l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
- la loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l’application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution ;
- le règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016, relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE ;
- le code de l’action sociale et des familles ;
- le code du travail ;
- la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés ;
- le règlement du 11 mars 2022 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les déclarations de conformité à la Constitution ;
Au vu des observations du Gouvernement, enregistrées le 7 décembre 2023 ;
Après avoir entendu les députés représentant les auteurs de la saisine ;
Et après avoir entendu le rapporteur ;
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S’EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT :

1. Les députés requérants défèrent au Conseil constitutionnel la loi pour le plein emploi. Ils critiquent la procédure d’adoption de la loi et contestent en outre la conformité à la Constitution de certaines dispositions de ses articles 1er, 2, 3, 4 et 7.
- Sur la procédure d’adoption de la loi :
2. Les députés requérants font tout d’abord valoir que l’avis du Conseil d’État n’a pas suffisamment éclairé le Parlement sur les difficultés juridiques que soulevait le projet de loi. Ils reprochent ensuite au Gouvernement d’avoir déposé ce projet de loi sans attendre les résultats d’une expérimentation, engagée dans plusieurs départements, portant sur un nouveau dispositif d’accompagnement des allocataires du revenu de solidarité active. Ils dénoncent également l’insuffisance de l’étude d’impact jointe au projet de loi. Enfin, ils soutiennent que les membres de la commission mixte paritaire n’auraient pas disposé du temps nécessaire pour analyser le texte soumis à leur examen. Il en résulterait, selon eux, une méconnaissance des exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire.
3. En premier lieu, aux termes de la première phrase du deuxième alinéa de l’article 39 de la Constitution : « Les projets de loi sont délibérés en conseil des ministres après avis du Conseil d’État et déposés sur le bureau de l’une des deux assemblées ». Il ne résulte ni de ces dispositions ni d’aucune autre exigence constitutionnelle ou organique que cet avis doit être transmis au Parlement.
4. En deuxième lieu, l’expérimentation invoquée par les députés requérants ne procède d’aucune disposition législative ou réglementaire prise sur le fondement de l’article 37-1 de la Constitution.
5. En troisième lieu, aux termes des troisième et quatrième alinéas de l’article 39 de la Constitution : « La présentation des projets de loi déposés devant l’Assemblée nationale ou le Sénat répond aux conditions fixées par une loi organique. - Les projets de loi ne peuvent être inscrits à l’ordre du jour si la Conférence des présidents de la première assemblée saisie constate que les règles fixées par la loi organique sont méconnues. En cas de désaccord entre la Conférence des présidents et le Gouvernement, le président de l’assemblée intéressée ou le Premier ministre peut saisir le Conseil constitutionnel qui statue dans un délai de huit jours ». Aux termes du premier alinéa de l’article 8 de la loi organique du 15 avril 2009 mentionnée ci-dessus : « Les projets de loi font l’objet d’une étude d’impact. Les documents rendant compte de cette étude d’impact sont joints aux projets de loi dès leur transmission au Conseil d’État. Ils sont déposés sur le bureau de la première assemblée saisie en même temps que les projets de loi auxquels ils se rapportent ». Selon le premier alinéa de l’article 9 de la même loi organique, la Conférence des présidents de l’assemblée sur le bureau de laquelle le projet de loi a été déposé dispose d’un délai de dix jours suivant le dépôt pour constater que les règles relatives aux études d’impact sont méconnues.
6. Le projet de loi a été déposé le 7 juin 2023 sur le bureau du Sénat et la Conférence des présidents n’a été saisie d’aucune demande tendant à constater que les règles relatives aux études d’impact étaient méconnues. Dès lors, le grief tiré de la méconnaissance de l’article 8 de la loi organique du 15 avril 2009 ne peut qu’être écarté.
7. En dernier lieu, aux termes de l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 : « La loi est l’expression de la volonté générale ». Aux termes du premier alinéa de l’article 3 de la Constitution : « La souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce par ses représentants ». Ces dispositions imposent le respect des exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire.
8. Il ressort du rapport établi conjointement par les rapporteurs des deux assemblées à l’issue de la réunion de la commission mixte paritaire que la commission a adopté un texte commun. Il n’appartient pas au Conseil constitutionnel de contrôler pour quels motifs ou dans quelles conditions une commission mixte paritaire parvient ou non à l’adoption d’un texte commun.
9. Le grief tiré de la méconnaissance des exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire doit donc être écarté.
10. Il résulte de ce qui précède que la loi déférée a été adoptée selon une procédure conforme à la Constitution.
- Sur certaines dispositions de l’article 1er :
11. Le a du 1° du paragraphe I de l’article 1er modifie l’article L. 5411-1 du code du travail afin de prévoir l’inscription sur la liste des demandeurs d’emploi auprès de l’opérateur France Travail, notamment, de la personne qui demande le revenu de solidarité active ainsi que celle de son conjoint, de son concubin ou du partenaire auquel elle est liée par un pacte civil de solidarité.
12. Les députés requérants reprochent à ces dispositions d’imposer l’inscription d’office des conjoints, concubins et partenaires des personnes sollicitant le revenu de solidarité active sur la liste des demandeurs d’emploi. Ce faisant, elles révéleraient à l’opérateur France Travail, sans le consentement des intéressés, les liens qu’ils entretiennent avec le demandeur de cette allocation. Ces dispositions auraient également pour conséquence de leur imposer des obligations auxquelles ils n’auraient pas consenti. Il en résulterait une méconnaissance du droit au respect de la vie privée, de la liberté individuelle et de la liberté personnelle.
13. Aux termes de l’article 2 de la Déclaration de 1789 : « Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l’homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté, et la résistance à l’oppression ». La liberté proclamée par cet article implique le droit au respect de la...

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