Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 6 octobre 2015, 14-19.499, Publié au bulletin

Presiding JudgeMme Mouillard
ECLIECLI:FR:CCASS:2015:CO00872
Case OutcomeCassation partielle
Appeal Number41500872
CitationDans le même sens que : Com., 2 décembre 2008, pourvoi n° 08-10.731, Bull. 2008, IV, n° 201 (2) (cassation partielle)
Date06 octobre 2015
CounselSCP Delvolvé,SCP Thouin-Palat et Boucard
Docket Number14-19499
CourtChambre Commerciale, Financière et Économique (Cour de Cassation de France)

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société française Toyota Industrial Equipment SA (la société Tiesa) et la société italienne Cesab Carelli Elevatori (la société Cesab), qui appartiennent au groupe Toyota et produisent des équipements industriels, se sont approvisionnées en contrepoids en fonte auprès de la société Fonderie GM Bouhyer ( la société Bouhyer) à partir du mois de septembre 2004, pour la première, et juin 2004, pour la seconde ; que ces sociétés ayant mis fin, courant 2009, à leurs relations commerciales avec la société Bouhyer, cette dernière les a assignées en réparation de son préjudice sur le fondement de l'article L. 442-6 I 5° du code de commerce ;

Sur les premier, deuxième, quatrième et cinquième moyens, réunis :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le troisième moyen, pris en sa première branche :

Vu l'article L. 442-6 I 5° du code de commerce ;

Attendu que pour dire que la société Bouhyer aurait dû bénéficier d'un préavis d'un an de la part des sociétés Tiesa et Cesab, l'arrêt relève que ces deux sociétés ont, de façon concomitante, noué des relations commerciales avec la société Bouhyer, qu'elles y ont mis fin dans des conditions identiques, respectivement en octobre et juin 2009, sans aucun préavis et qu'elles justifient de leur rupture par des motifs similaires ; qu'il retient que les conséquences de ces ruptures pour la société Bouhyer ont nécessairement été amplifiées dans la mesure où elles se sont cumulées et qu'il convient, pour apprécier la durée du préavis, de prendre en compte le chiffre d'affaires global généré par les sociétés Tiesa et Cesab, dans la mesure où elles ont entretenu une relation commerciale avec la société Bouhyer, sur une même période et sur des produits identiques, avec des exigences similaires en termes quantitatifs ; qu'il ajoute que ce chiffre d'affaires ayant augmenté de manière importante au cours des années 2007 et 2008 pour atteindre 10,20 % en 2007 et 9,75 % en 2008, il en résulte qu'en termes de réorganisation, la société Bouhyer a dû, au cours d'une même période, pallier la perte de deux clients avec lesquels elle avait un chiffre d'affaires conséquent ;

Qu'en se déterminant ainsi, alors qu'elle avait relevé que les sociétés Tiesa et Cesab, bien qu'appartenant à un même groupe et ayant la même activité, étaient deux sociétés autonomes qui avaient entretenu avec la société Bouhyer des relations commerciales distinctes, la cour d'appel, qui n'a pas constaté qu'elles avaient agi de concert, n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que le préavis dont devait bénéficier la société Fonderie Bouhyer de la part des sociétés Tiesa et Cesab Carrel Elevatori est de un an et condamne ces dernières à payer à la société Fonderie Bouhyer les sommes respectives de 2 361 164,36 euros et 604 913,98 euros au titre de la marge brute perdue, l'arrêt rendu le 30 janvier 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points , la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société Fonderie GM Bouhyer aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme globale de 3 000 euros aux sociétés Toyota Industrial Equipment SA (Tiesa) et Cesab Carreli Elevatori et rejette sa demande ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du six octobre deux mille quinze.


MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour la société Toyota Industrial Equipment et autre

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que les sociétés Tiesa et Cesab ont rompu brutalement leurs relations avec la société Fonderie GM Bouhyer, que le préavis dont devait bénéficier la société Fonderie GM Bouhyer de la part des sociétés Tiesa et Cesab est d'un an, et condamné la société Tiesa à payer la société Fonderie GM Bouhyer la somme de 2.361.164,36 € au titre de la marge brute perdue ;

AUX MOTIFS QUE les sociétés Tiesa et Cesab Carreli Elevatori soutiennent que c'est à juste titre que l'une comme l'autre ont rompu sans préavis les relations qu'elles entretenaient avec la société Fonderie Bouhyer en raison de la gravité des inexécutions contractuelles de celle-ci ; qu'elles font valoir qu'il convient d'examiner de façon séparée les relations ayant existé entre chacune d'elles et le groupe Bouhyer ; que la société Fonderie Bouhyer conteste les griefs formulés à son encontre et soutient que les sociétés Tiesa et Cesab Carreli Elevatori ne peuvent pas être dissociées, qu'elles appartiennent au groupe Toyota qui pratique une politique d'achat commune à toutes les filiales et qu'en conséquence, elle n'est qu'un fournisseur comme un autre du groupe sur l'échelle mondiale et tout au plus un fournisseur significatif à l'échelle européenne ; que les sociétés Tiesa et Cesab Carreli Elevatori, bien qu'appartenant à un même groupe et ayant la même activité, sont deux sociétés autonomes qui ont toujours entretenu des relations commerciales distinctes avec la société Fonderie Bouhyer, chacune passant ses propres commandes et chacune ayant mis fin individuellement à sa relation commerciale avec la société Fonderie Bouhyer, de sorte que la rupture des relations commerciales doit être examinée au regard des relations de la société Fonderie Bouhyer avec chacune des deux sociétés ; qu'il ne peut être contesté que les deux sociétés qui avaient de façon concomitante noué des relations commerciales avec la société Fonderie Bouhyer ont mis fin à celles-ci dans des conditions identiques, la société Cesab Carreli Elevatori par un courrier du 25 juin 2009 et la société Tiesa par un courrier du 7 octobre 2009, l'une et l'autre sans aucun préavis ; que d'ailleurs, elles justifient leur rupture des relations commerciales sur des motifs similaires ; que les conséquences de ces ruptures ont nécessairement été amplifiées pour la société Fonderie Bouhyer dans la mesure où elles se sont cumulées ;

Sur la rupture des relations commerciales établies :

que l'article L. 442-6 du code de commerce dispose qu'« engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers: (...) 5° De rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale (...) » mais que ces dispositions « ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations » ; que la société Tiesa affirme que la société Fonderie Bouhyer a toujours refusé de coopérer et lui a imposé des décisions, la mettant elle-même dans l'impossibilité de répondre à ses propres clients, et qu'elle a dû transférer en urgence une partie de sa production à un autre fournisseur, dans la mesure où à défaut d'être fournie en contrepoids elle ne pouvait pas honorer ses commandes ; qu'elle formule cinq reproches à la société Fonderie Bouhyer à savoir :

- un défaut de respect des quantités ;

- un défaut de livraison dans les délais ;

- un défaut de respect de la qualité ;

- un défaut de prise en compte des améliorations de performance proposées par les deux sociétés ;

- un abus de sa position pour imposer une politique de prix ;

sur les quantités :

que la société Tiesa soutient que la société Fonderie Bouhyer a manqué à ses obligations quant aux volumes convenus, faisant valoir qu'elle avait lancé en 2007 un nouveau modèle et qu'elle avait alors adressé à ses fournisseurs une demande avec des volumes prévisionnels ; que la société Fonderie Bouhyer conteste avoir accepté des volumes prévisionnels, soutenant avoir seulement refusé de désorganiser son outil de production pour favoriser les demandes des sociétés Tiesa et Cesab Carreli Elevatori au détriment de ses autres clients et d'accentuer au delà du raisonnable sa dépendance à leur égard ; que la société Tiesa affirme que la société avait accepté de lui vendre des quantités précises de contrepoids ; qu'elle se réfère à un courrier qu'elle a adressé le juillet 2006 à la société Fonderie Bouhyer, auquel avait été annexé un tableau mentionnant des quantités annuelles ; qu'il s'agit d'un document établi par la société Tiesa qui ne démontre pas avoir reçu l'aval de son partenaire, la société Fonderie Bouhyer lui ayant au contraire clairement indiqué qu'elle ne souhaitait pas s'engager sur de tels volumes, que la société Tiesa ne fournit aucun document laissant supposer que la société Fonderie Bouhyer ait donné son accord sur des volumes de production ;

qu'au contraire, il résulte des courriers échangés que la société Fonderie Bouhyer n'a eu de cesse que d'alerter ses deux partenaires sur son impossibilité à produire les quantités souhaitées par elles ; qu'ainsi, à l'occasion de la mise en fabrication d'un nouveau modèle de chariot, la société Fonderie Bouhyer a écrit par email du 24 mai 2007 en distinguant sa capacité de production brute et celle de produits finis, indiquant « Nous vous confirmons ce que nous avions annoncé début avril en terme de capacité.

Nous n'avons pas de souci en termes de moulage et nous pourrons produire les quantités suivantes : 30...

Pour continuer la lecture

SOLLICITEZ VOTRE ESSAI

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT