CAA de PARIS, 5ème chambre, 30/06/2023, 21PA02612, Inédit au recueil Lebon

Presiding JudgeMme VINOT
Record NumberCETATEXT000047773676
Judgement Number21PA02612
Date30 juin 2023
CounselRIVAULT
CourtCour administrative d'appel de Paris (Cours Administrative d'Appel de France)
Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête transmise au tribunal administratif de Paris par le tribunal administratif de Cergy-Pontoise, Mme H... a demandé la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2008.

Par un jugement n° 1914650 du 30 mars 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés le 12 mai 2021 et le 26 octobre 2022, Mme H..., représentée par Me Rivault, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1914650 du 30 mars 2021 du tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge des impositions contestées, en droits et pénalités et d'ordonner la restitution des sommes déjà versées, avec les intérêts moratoires ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :
- le tribunal a omis de se prononcer sur le moyen suivant lequel rien n'établit que les commissions et honoraires visés sont rattachables à une activité taxable en France et à ce titre soumis à l'obligation d'être déclarés en France ;
- il a entaché son jugement d'erreur de fait, d'erreur de droit et d'erreur manifeste d'appréciation ;
- l'administration ne pouvait pas qualifier d'occulte son activité et dire qu'elle tentait de se soustraire à la taxe sur la valeur ajoutée, alors que son activité était connue de l'administration fiscale au Royaume-Uni et qu'elle était exonérée de taxe sur la valeur ajoutée tant en France qu'au Royaume-Uni, dans le cadre du régime instauré par l'article 153 de la directive 2006/12 ;
- les rappels litigieux sont intervenus à l'issue d'une procédure irrégulière, dès lors que l'administration fiscale ne pouvait faire application d'un délai de reprise de dix ans, ni avoir recours à la procédure de taxation d'office, la qualification d'activité occulte étant contestée ;
- la procédure d'imposition a été exercée en violation des droits fondamentaux garantis par la charte de l'Union européenne, en particulier ses articles 15 et 21, ainsi que par les articles 4§3, 5§4 et 18 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;
- en omettant d'adresser une demande d'information au titre de la TVA à leurs homologues anglais en application des dispositions du Règlement (UE) n° 904/2010 du Conseil du 7 octobre 2010, en vue de clarifier le régime de TVA qui lui était appliqué, les autorités fiscales françaises ont enfreint les dispositions de ce règlement ;
- les prestations de service litigieuses relevaient du siège anglais de son entreprise et n'étaient donc pas taxables en France ;
- elle n'était, en tout état de cause, pas redevable de la taxe sur la valeur ajoutée qui devait être acquittée par le preneur ;
- la pénalité de 80 % prise en application de l'article 1728 du code général des impôts est injustifiée dès lors qu'elle a démontré sa bonne foi ; elle a commis une erreur justifiant qu'elle ne se soit pas acquittée de ses obligations déclaratives ;
- l'application de l'amende de 50 % prévue par l'article 1736 du code général des impôts est insuffisamment motivée, n'a pas été précédée d'une première demande de régularisation de l'administration et n'était, en tout état de cause, pas applicable à l'exercice 2005 ;
- cette amende méconnaît l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;
- elle méconnaît les énonciations de l'instruction 16-K-9-07 du 24 octobre 2017 ;
- l'objet des pénalités prises en application des articles 1728 et 1736 du code général des impôts étant le même, cette double sanction est contraire au principe non bis in idem, en violation de l'article 4 du protocole 7 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et de la constitution ;
- la pénalité de l'article 1736 du code général des impôts, de même que la pénalité de l'article 1728 de ce même code, doivent être écartée en cas de preuve que la contribuable a satisfait à l'ensemble de ses obligations déclaratives dans un autre Etat membre de l'Union et que c'est par erreur qu'elle n'a pas déposé la déclaration DAS2 requise par l'article 240 du code général des impôts ;
- elle a été discriminée en raison de sa nationalité britannique, en méconnaissance de l'article 21§2 de la charte des droits fondamentaux et des articles 5§4 et 10 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 29 septembre et le 21 décembre 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par Mme H... n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
- la Constitution, et notamment son Préambule ;
- la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son protocole n° 7 ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;
- la convention entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du nord tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscal en matière d'impôts sur le revenu signée le 22 mai 1968 ;
- le règlement (CE) n° 1798/2003 du Conseil du 7 octobre 2003 concernant la coopération administrative dans le domaine de la taxe sur la valeur ajoutée et abrogeant le règlement (CEE) n° 218/92 ;
- le règlement (UE) n° 904/2010 du Conseil du 7 octobre 2010 ;
- la directive 77/388/CEE du Conseil du 17 mai 1977 ;
- la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- l'ordonnance n° 2005-1512 du 7 décembre 2005 relative à des mesures de simplification en matière fiscale et à l'harmonisation et l'aménagement du régime des pénalités ;
- les arrêts de la Cour de justice de l'Union européenne du 4 juillet 1985, Berkholz
(C-168/84) et du 17 juillet 1997, ARO Lease (C-190/95) ;
- la décision du Conseil constitutionnel n° 2012-267 QPC du 20 juillet 2012 ;
- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Vrignon-Villalba,
- les conclusions de Mme Lescaut, rapporteure publique,
- et les observations de Me Rivault, pour Mme H....

Une note en délibéré, présentée pour Mme H..., a été enregistrée le 12 juin 2023.


Considérant ce qui suit :

1. Mme D... H..., de nationalité britannique, exerce une activité de courtier en marchandises consistant en la mise en relation de fournisseurs français et de commerçants britanniques et internationaux dans le milieu de la mode et du prêt-à-porter. Son entreprise individuelle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité pour la période du 1er janvier 2004 au 31 décembre 2008. A l'issue de ce contrôle, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités ont été notifiés à Mme H... selon la procédure de taxation d'office, par une proposition de rectification du 20 décembre 2010. A la suite de l'entrevue avec l'interlocuteur départemental, les rappels subsistant correspondent exclusivement à la TVA collectée sur les rémunérations versées par des clients français pour une prestation de mise en relation ou une prestation de conseil. Mme H... a demandé la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2008, pour un montant total de 130 787 euros, ainsi que de la pénalité et de l'amende qui lui ont été infligées, respectivement, sur le fondement des articles 1728 et 1736 du code général des impôts. Elle relève appel du jugement du 30 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".

3. Il ressort des pièces du dossier que le tribunal administratif de Paris, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, a répondu à tous les moyens soulevés par Mme H..., s'agissant en particulier, aux points 2 à 8 et 10 du jugement, de la question de savoir si les commissions et honoraires perçues par Mme H... de la part de clients français visés sont rattachables à une activité taxable en France et à ce titre soumis à l'obligation d'être déclarés en France.

4. En second lieu, il appartient au juge d'appel d'apprécier, au vu des moyens soulevés par les parties et des moyens d'ordre public, la régularité du jugement de première instance. En revanche, dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, ce juge est saisi du litige et doit se prononcer non sur les motifs du jugement mais directement sur les moyens mettant en cause la régularité et le bien-fondé des impositions en litige. Par suite, Mme H... ne peut, en tout état de cause, utilement se prévaloir de ce que le jugement attaqué serait entaché d'une erreur de fait, d'une erreur de droit ou d'une erreur manifeste d'appréciation.

5. Ainsi, à supposer même que Mme H... ait entendu soulever ces moyens tirés de l'irrégularité du jugement, ceux-ci ne peuvent qu'être écartés.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

Sur le bien-fondé des...

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