CAA de PARIS, 4ème chambre, 25/04/2017, 16PA03427, Inédit au recueil Lebon

Presiding JudgeM. V
Date25 avril 2017
Record NumberCETATEXT000034505144
Judgement Number16PA03427
CounselGAFSIA
CourtCour administrative d'appel de Paris (Cours Administrative d'Appel de France)

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F...C...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler la décision du 3 décembre 2015 par laquelle le préfet de Seine-et-Marne a ordonné qu'il soit procédé à la perquisition de son logement situé 10 rue Pierre Méchain à Lieusaint 77127.

Par un jugement du 22 avril 2016, le Tribunal administratif, avant de statuer sur la requête de M. F...C..., a sursis à statuer sur cette requête afin de transmettre au Conseil d'Etat, en application de l'article L. 113-1 du code de justice administrative, le dossier de l'affaire et lui soumettre les questions suivantes :

1°) L'existence reconnue par le Conseil Constitutionnel dans sa décision
n° 2016-536 QPC du 19 février 2016 de l'exercice d'un recours effectif par le biais d'une action indemnitaire a posteriori est-elle exclusive d'une action en excès de pouvoir dirigée contre l'ordre de perquisition édicté par le préfet '

2°) En cas de responsabilité pour faute, dans quelle mesure le juge administratif doit-il prendre en compte les moyens tirés de l'illégalité de l'ordre de perquisition pour apprécier l'existence d'une responsabilité de l'administration ' Y a-t-il lieu de distinguer entre les vices propres de cet ordre de perquisition et son bien-fondé '
3°) Dans quelle mesure le juge administratif, s'il demeure compétent, doit-il tenir compte des résultats de la perquisition et des renseignements recueillis sur la personne visée pour déterminer le régime de responsabilité applicable et l'étendue de la responsabilité de l'administration '

Le Conseil d'Etat a statué sur ces questions par un avis n° 399135 du 6 juillet 2016.

Par un jugement n° 1600678 du 23 septembre 2016, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés respectivement le 25 novembre 2016,
le 3 mars 2017 et le 31 mars 2017, M.C..., représenté par Me Gafsia, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Melun n° 1600678 du
23 septembre 2016 ;

2°) d'annuler la décision du préfet de Seine-et-Marne du 3 décembre 2015 ordonnant qu'il soit procédé à la perquisition de son domicile ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser, à titre principal, une indemnité de 500 000 euros en réparation du préjudice moral subi par lui et sa famille du fait de cette décision de perquisition, des conditions de son déroulement et de l'illégalité de la saisie des données informatiques et, à titre subsidiaire, 400 000 euros pour ces mêmes préjudices en l'absence de faute de l'Etat ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :
- l'ordre de perquisition attaqué est insuffisamment motivé en fait, dans la mesure où le préfet se borne à indiquer qu'il serait proche d'individus se livrant en région parisienne au trafic de faux documents et au recrutement de volontaires pour l'Iraq, sans donner de précisions sur cette proximité et n'indique pas le genre de relation qu'il aurait eu avec des djihadistes, ni le nom des associations qui prôneraient le communautarisme et le radicalisme religieux ;
- la commission nationale informatique et libertés (CNIL) a précisé le 25 février 2016 qu'il n'est pas enregistré par la gendarmerie nationale dans le fichier TAJ et le 10 mars 2016 qu'aucune donnée le concernant n'est détenue par les services de renseignement territorial ;
- le préfet a commis une erreur de fait et une erreur manifeste d'appréciation ;
- le préfet ne produit aucun élément factuel permettant de penser qu'il existerait des raisons sérieuses de penser qu'il représenterait une menace pour la sécurité publique ;
- les 29 attestations de témoins qu'il produit démontrent qu'il pratique pacifiquement sa religion musulmane et est tolérant et respectueux des croyances des autres ;
- son épouse ne porte pas le voile ;
- il est diplômé d'une école d'ingénieur en aéronautique et a une activité professionnelle stable ;
- il élève ses deux petites jumelles en bon père de famille ;


- il est généreux, soucieux du bien-être d'autrui, et effectue régulièrement des dons à diverses associations caritatives venant en aide aux populations indigentes, tel que Médecins du monde, en étant membre actif de l'association Espérance qui distribue des plats chauds ;
- s'il lui est arrivé de croiser les frères Arnaudet et SofianeE..., de manière occasionnelle, parce qu'ils résidaient dans le quartier où était situé son domicile à Mitry-Mory et fréquentait la même mosquée, et de jouer au football avec les frères Arnaudet et d'être allé au restaurant avec eux, cela n'implique pas une proximité idéologique avec eux ;
- il ne partageait pas leurs convictions politiques et religieuses et s'opposait à leurs positions politiques ;
- le seul fait de fréquenter de manière ponctuelle certaines personnes sans connaître leurs intentions est insuffisant pour déterminer la dangerosité d'un individu ;
- l'association Barakacity n'est pas considérée comme dangereuse puisque le ministère de l'intérieur ne l'a pas dissoute et son site internet demeure en libre accès ;
- il conteste avoir fréquenté l'association Reconnaissance et ne connaît pas le Cheikh Ayoub ;
- l'ordre de perquisition ayant été exécuté dans des conditions particulièrement violentes et traumatisantes pour les enfants, attentatoire à sa dignité et aux exigences de respect de la vie privée et familiale, l'administration a violé l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, ainsi que les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- ces conditions d'exécution constituent un traitement inhumain et dégradant au sens de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- ses enfants ont été traumatisés par cette perquisition, notamment sa fille X... alors âgée de 12 mois ;
- cette ingérence dans leur vie privée est dépourvue de base légale au sens de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme ;
- les autorités de l'enquête n'ont pas reçu l'aval d'un juge avant de prendre cette décision de perquisition et de l'exécuter ;
- ils ont été privés de...

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