CAA de DOUAI, 4ème chambre, 11/04/2024, 23DA00311, Inédit au recueil Lebon

Presiding JudgeM. Heinis
Record NumberCETATEXT000049424422
Judgement Number23DA00311
Date11 avril 2024
CounselDEMAILLY
CourtCour administrative d'appel de Douai (Cours Administrative d'Appel de France)
Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) GEF Industrie a demandé au tribunal administratif d'Amiens, par deux demandes successives, de prescrire la restitution, d'une part, à concurrence de la somme de 26 306 euros, d'un crédit d'impôt recherche au titre de l'exercice clos en 2017 et, d'autre part, à concurrence de la somme de 43 254 euros, d'un crédit d'impôt recherche au titre de l'exercice clos en 2019.

Par un jugement nos 2001526, 2103627 du 22 décembre 2022, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté ces demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistré le 20 février 2023, la SAS GEF Industrie, représentée par la SELARL Franck Demailly, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prescrire les restitutions demandées, le cas échéant, après avoir décidé, avant dire-droit, une expertise ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :
- l'ensemble des opérations de recherche sur lesquelles portaient ses deux demandes de crédit d'impôt se rapportant aux exercices clos en 2017 et en 2019 et qu'elle a conduites en partenariat avec la société Greenfluid, autre entité du groupe auquel elle appartient, ce dont il n'a pas été tenu compte, était éligible à cet avantage ;
- il en est de même des dépenses de veille technologique, telles que définies à l'article 49 septies I quater de l'annexe III au code général des impôts, qu'elle a exposées au titre de ces mêmes exercices, dont l'éligibilité n'est, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal administratif, pas subordonnée au rattachement de ces dépenses à une opération de recherche en particulier ; le paragraphe n° 250 de la doctrine administrative publiée sous la référence BOI-BIC-RICI-10-10-20-50 conforte son analyse sur ce point ;
- eu égard aux compétences qu'il a acquises, en raison de sa grande expérience, dans le domaine des lubrifiants spéciaux, son président, qui a pris une part active dans la direction des opérations de recherche n° 1, n° 3 et n° 5 ayant fait l'objet de la demande de crédit d'impôt recherche qu'elle a formée au titre de l'exercice clos en 2019, a été regardé à tort comme insuffisamment qualifié pour mener ces travaux ; le paragraphe n° 70 de la doctrine administrative publiée sous la référence BOI-BIC-RICI-10-10-20-20 conforte son analyse sur ce point ;
- elle justifie que les autres personnels ayant participé directement aux opérations de recherche n° 3 et n° 5 satisfont à la condition de qualification requise pour permettre de les regarder comme des techniciens de recherche éligibles ;
- si la cour ne s'estimait pas suffisamment informée sur l'éligibilité des travaux en cause au crédit d'impôt recherche, il lui appartiendrait de décider, avant dire-droit, une expertise aux fins de l'éclairer sur cette éligibilité, en tenant compte de l'accomplissement conjoint de ces travaux avec la société Greenfluid.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 mai 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :
- les conclusions de la requête doivent s'entendre comme tendant à la restitution des fractions de crédit d'impôt recherche qui n'ont pas été restituées à la SAS GEF Industrie après l'admission partielle de ses réclamations et qu'elle n'a pas imputées sur l'impôt sur les sociétés dû par elle au titre des exercices suivants ;
- pour faire partiellement droit, par une décision du 19 mars 2020, à la réclamation de la SAS GEF Industrie se rapportant à l'exercice clos en 2017, l'administration a commis une erreur en fixant à 63 021 euros le montant qui devait lui être restitué, alors que ce montant aurait dû être limité à 41 339 euros, de sorte que la SAS GEF Industrie a perçu indûment une somme de 21 622 euros ;
- il résulte notamment de l'avis émis par la direction régionale à la recherche et à la technologie (DRRT) des Hauts-de-France que les projets n° 3 et n° 4 présentés par la SAS GEF Industrie au titre de l'année 2017 n'étaient pas éligibles au crédit d'impôt recherche ;
- il résulte notamment de l'avis émis par la direction régionale académique à la recherche et à l'innovation (DRARI) que les projets n° 2, n° 4 et n° 6 présentés par la SAS GEF Industrie au titre de l'année 2019 n'étaient pas éligibles au crédit d'impôt recherche ;
- il en est de même des dépenses de veille technologique ne se rapportant pas à des projets particuliers éligibles dont a fait état la SAS GEF Industrie au titre de ces deux années et dont elle n'a pas justifié de la réalité ; la SAS GEF Industrie n'est, à cet égard, pas fondée à invoquer le paragraphe n° 250 de la doctrine administrative publiée sous la référence BOI-BIC-RICI-10-10-20-50, dont le paragraphe n° 260 énonce que les dépenses de veille technologique ne sont éligibles que pour autant qu'elles sont liées à la réalisation d'opérations de recherche ;
- quand bien même la cour regarderait tout ou partie de ces projets comme éligibles à cet avantage, l'ensemble des dépenses de personnel associées à ceux-ci et aux projets dont l'éligibilité a été admise, ne pourrait être pris en compte, comme se rapportant à des heures de travail accomplies par des salariés n'ayant pas la qualification attendue de personnels de recherche ; la SAS Greenfluid n'est pas fondée à se prévaloir, à cet égard, des énonciations du paragraphe n° 70 de la doctrine administrative publiée sous la référence BOI-BIC-RICI-10-10-20-20 ;
- dans ces conditions, l'expertise demandée par la SAS GEF Industrie ne serait pas utile.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jean-François Papin, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Jean-Philippe Arruebo-Mannier, rapporteur public.


Considérant ce qui suit :

Sur l'objet du litige :

1. La société par actions simplifiée (SAS) GEF Industrie, qui a été créée en 1996 et dont le siège est situé à Villers-Bretonneux (Somme), a pour activité l'étude, la conception et la fabrication de solvants, dégraissants, lubrifiants évanescents, aérosols ou produits d'usinage, de même que de protection antirouille ou démoulants, qui sont utilisés par des groupes pétroliers, ainsi que par des industriels exerçant dans les domaines de la mécanique, de la découpe ou du traitement des matériaux ou encore de l'agro-alimentaire. Elle dispose d'un réseau de partenaires en France, en Europe, ainsi qu'en Asie. A raison des actions mises en œuvre par elle en matière de recherche et développement, cette société s'est prévalue, au titre de l'année 2017, d'un crédit d'impôt recherche d'un montant de 89 327 euros, dont elle a demandé, par voie de réclamation, la restitution anticipée à concurrence d'une somme de 67 705 euros, le reliquat de 21 622 euros ayant été imputé sur sa cotisation de l'impôt sur les sociétés de l'exercice clos le 30 juin 2018.

2. Avant de se prononcer sur cette réclamation, l'administration a consulté, pour ce qui concerne l'éligibilité technique des cinq projets de recherche concernés, la direction régionale à la recherche et à la technologie (DRRT) des Hauts-de-France, qui a estimé que trois de ces projets étaient éligibles au crédit d'impôt recherche, ainsi qu'une partie des dépenses de veille technologique exposées pour les besoins des projets éligibles. En se fondant notamment sur cet avis technique, le service a, par une décision du 19 mars 2020, fait partiellement droit à la réclamation de la SAS GEF Industrie, en lui accordant, à concurrence d'un montant de 63 021 euros, la restitution du crédit d'impôt recherche sollicité au titre de l'exercice clos en 2017. Insatisfaite de cette admission partielle, la SAS GEF Industrie a porté le litige devant le tribunal administratif d'Amiens, en lui demandant de prescrire la restitution, à concurrence de la somme de 26 306 euros, du crédit d'impôt recherche revendiqué par elle au titre de l'exercice clos en 2017.

3. Par ailleurs, à raison des actions mises en œuvre par elle en matière de recherche et développement, cette société s'est prévalue, au titre de l'année 2019, d'un crédit d'impôt recherche d'un montant de 79 781 euros dont elle a demandé, par voie de réclamation, la...

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