CAA de BORDEAUX, 3ème chambre - formation à 3, 30/11/2017, 15BX04247, 16BX00036, Inédit au recueil Lebon

Presiding JudgeM. DE MALAFOSSE
Record NumberCETATEXT000036122806
Judgement Number15BX04247, 16BX00036
Date30 novembre 2017
CounselCABINET DE CASTELNAU
CourtCour administrative d'appel de Bordeaux (Cours Administrative d'Appel de France)
Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

La société Guintoli a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler la délibération du 22 décembre 2010 par laquelle le département de la Haute-Garonne a résilié le marché, signé le 2 décembre 2008, de construction d'une section de déviation de la RD 37 et la décision en date du 15 avril 2011 rejetant le recours gracieux présenté le 19 mars 2011, d'annuler le marché de travaux de substitution signé le 23 juin 2011 par le département avec la société Eiffage travaux publics sud-ouest Midi-Pyrénées, de condamner le département de la Haute-Garonne à lui verser les sommes de 373 258,89 euros au titre du règlement de l'acompte mensuel n° 19, de 3 112 969,47 euros au titre des sommes dues avant la résiliation assorties des intérêts moratoires au taux de 7,75 % à compter du 11 mai 2011, et de condamner le département à l'indemniser de la somme de 100 000 euros assortie des intérêts au taux légal au titre de la perte de chance d'obtenir l'attribution du marché de substitution.

Par un jugement n° 1103032 et 1304646 du 3 novembre 2015, le tribunal administratif de Toulouse a condamné le département de la Haute-Garonne à payer à la société Guintoli la somme de 694 078,15 euros assortie des intérêts légaux et à supporter la charge des dépens de l'instance. Le tribunal a, pour le surplus, rejeté les prétentions de la société Guintoli.

Procédure devant la cour :

I) Par une requête, enregistrée le 30 décembre 2015 sous le n° 15BX04247, et un mémoire complémentaire enregistré le 29 mai 2017, le département de la Haute-Garonne, représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter, au besoin après expertise complémentaire, la demande présentée par la société Guintoli devant le tribunal ;

3°) de mettre à la charge de la société Guintoli une somme 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :
- le tribunal, qui était saisi comme juge du référé provision a méconnu son office en tant que juge du référé-provision puisqu'il ne s'est pas borné à un examen du caractère sérieusement contestable de la créance et a prononcé une condamnation à l'encontre du département.
- le tribunal a omis de statuer sur la fin de non-recevoir soulevée devant lui par le département dans une note en délibéré et tenant au caractère définitif du décompte général ;
- le jugement est insuffisamment motivé en ce qu'il ne permet pas de comprendre les sommes allouées à la société Guintoli en ce qui concerne les postes référencés par l'expert 8b, 3b, 1a, 1j, 2c, 1d, 1k, 2b et 2e ;
- il entend reprendre en appel l'intégralité de son argumentation de première instance ;
- s'agissant du poste 2a, les sur-quantités de décapage demandées correspondent exactement à ce qui était rendu nécessaire par la variante technique proposée par l'entreprise pour récupérer le matériau entre le fossé et la limite d'emprise et découlant d'un accord entre les parties ; le maître d'oeuvre était prêt à rémunérer une éventuelle perte de rendement dans la mesure où la société Guintoli lui en apportait les éléments de chiffrage, or l'entreprise n'a jamais produit ces éléments ; le prix a fait l'objet d'un ordre de service (OS) signé sans réserve par la société le 19 octobre 2010 et qui ne peut donc plus être contesté ;
- s'agissant du poste 3a, le matériau d'emprunt du site a fait l'objet d'une étude qui a conclu à la nécessité d'un traitement sur 45 cm minimum ; suite à cette étude la société a proposée la substitution du prix 134 au prix 24 ; seule la partie au-delà des 45 cm pourrait être indemnisée ; par contre il n'y a pas lieu d'appliquer le prix 27 car il a déjà été payé à l'entreprise ; l'indemnisation ne peut donc excéder 31 327,20 euros ;
- s'agissant du poste 8b, du fait de l'abandon du chantier par l'entreprise avant la réalisation des deux couches d'enrobé, le contrôle externe sur la couche de base, la couche de roulement et les accotements n'a pas été réalisé ; entre outre les quatre études de traitement ont entraîné un surcoût de contrôle extérieur que la maîtrise d'oeuvre a pris en charge, pour la partie au-delà des 45 cm ; les travaux supplémentaires réalisés par l'entreprise sont largement rémunérés par la non réalisation de l'ensemble des essais prévus au marché ;
- s'agissant du poste 1n, les réserves à un OS doivent être émises dans les 15 jours pour être recevables ; la signature sans réserve de l'OS n° 19/2009 implique que la société Guintoli a renoncé à toute rémunération supplémentaire ;
- s'agissant du poste 3b, un avis du comité consultatif de règlement amiable des litiges relatifs aux marchés publics (CCIRA) ne lie pas le juge, contrairement à ce que semble avoir estimé le tribunal ; le pourcentage supplémentaire de liant a été autorisé par le maître d'oeuvre à la demande de l'entreprise mais elle supporte la responsabilité de cette dépense en raison de son manque de réactivité au regard des dates de lancement des différentes études et par ses choix de liant ; elle a été défaillante dans la gestion de ses études ;
- s'agissant des postes 1i, 1j et 2c, le marché ne prévoyait pas la seule signalisation sur la zone de chevauchement ; l'article 8.1 du CCAP précise que l'entrepreneur doit réaliser pendant la période de préparation le dossier de signalisation du chantier ; les mentions du CCTP le prévoient aussi, de même que les arrêtés pris dans le cadre de la réalisation du chantier et que la société n'a jamais contestés ; la signalisation était contractuellement de la responsabilité de la société Guintoli pour l'ensemble du chantier et non seulement pour la zone de chevauchement ; la mise au point laborieuse du dossier de phasage provient essentiellement de la méconnaissance de ce type de chantier par l'encadrement de l'entreprise ; la décision d'exécuter les travaux de chevauchement sous route fermée n'a jamais été imposée par la maîtrise d'oeuvre ; la demande indemnitaire sur ce point n'a été présentée par la société que le 27 mai 2010, soit après le courrier du 8 février 2010 et alors que le chantier a démarré en juin 2009 ;
- s'agissant du poste 2b, si l'entreprise a modifié le matériau sans en informer le maître d'oeuvre c'est pour des raisons financières et non techniques ; il ne s'agit pas de travaux supplémentaires au sens de la jurisprudence ; la maîtrise d'oeuvre n'a jamais demandé à la société cette modification du matériau ;
- s'agissant du poste 8d si lors des réunions avec les concessionnaires de réseaux le représentant de France Télécom n'a pas signalé la présence d'un réseau dans la zone de chevauchement, ce réseau figurait bien dans les plans fournis par France Télécom dans le cadre des DICT ; ces travaux ont été pris en charge en totalité par le maître d'oeuvre ; en outre, les travaux dans la zone de chevauchement n'ont jamais été arrêtés ; les travaux supplémentaires ont été clairement définis dès connaissance de l'existence de ce réseau ; aucun ajournement n'est intervenu et la société ne peut donc prétendre à aucune indemnité à ce titre ;
- dans l'hypothèse où la cour ne s'estimerait pas suffisamment informée sur le litige, elle devrait désigner un expert ; l'expertise réalisée en premier lieu est en effet critiquable ;
- l'avis du CCIRAL doit être écarté des débats.

Par des mémoires enregistrés les 5 mars 2017, 23 mars 2017 et 14 juin 2017, la société Guintoli conclut à la réformation du jugement en ce qu'il a limité à 694 618,04 euros le montant de l'indemnité mise à la charge du département de la Haute-Garonne ; elle sollicite, outre la jonction avec l'instance n° 16BX00036, la condamnation du département à lui verser une indemnité supplémentaire de 1 395 445,37 euros TTC ou, à tout le moins, de 1 348 599,18 euros HT, de constater l'illégalité de la résiliation du marché et de condamner le département à lui verser à ce titre une indemnité de 311 296 euros augmentée des intérêts légaux, d'annuler le marché de substitution conclu avec la société Eiffage et de condamner le département à lui verser une indemnité de 100 000 euros augmentée des intérêts légaux, de mettre à la charge du département la moitié des frais d'expertise, soit 18 915,60 euros, enfin de mettre à la charge du département la somme de 84 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :
- la cour doit confirmer définitivement la somme arrêtée par le tribunal administratif soit 694 618,04 euros, correspondant à des évaluations sérieuses de l'expert ;
- le département ne peut sérieusement contester la régularité du jugement en ce qu'il ne s'est pas prononcé sur la provision dès lors qu'il a statué au fond ; le département n'expose pas en quoi le tribunal devait tenir compte de sa note en délibéré ; le moyen tenant à l'insuffisance de motivation du jugement manque en fait ; le tribunal n'a pas commis d'erreur de droit en se fondant sur une expertise circonstanciée ;
- le premier juge ne pouvait viser l'acompte n° 19 sans méconnaitre le principe selon lequel, en cas de demande indemnitaire, l'entreprise n'est liée que par son mémoire en réclamation sur le décompte général notifié par le maître de l'ouvrage ; les demandes indemnitaires de l'entreprise Guintoli sont donc fondées sur le seul mémoire en réclamation produit à la suite de la notification tardive du décompte général par le maitre de l'ouvrage le 21 janvier 2014 ; or, ce mémoire ne vise pas la situation n° 19, se bornant à contester le montant du solde du marché notifié par le maitre de l'ouvrage le 21 janvier 2014 pour un montant de 3 306 844,61 euros HT ; dans ces conditions, le tribunal ne pouvait rejeter le paiement de la somme de 373 258,89 euros HT au motif que " la société Guintoli demande le versement de la somme de 373 258,89 euros HT au titre du règlement de ses derniers travaux sur le site du chantier qu'elle rattache à un acompte mensuel n° 19 du mois...

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