Tribunal de grande instance de Paris, Chambre civile 3, 21 décembre 2007, 04/15827

Date21 décembre 2007
Docket Number04/15827
CourtTribunal de Grande Instance de Paris (France)

3ème chambre 2ème section


Assignation du :
04 Octobre 2004

JUGEMENT
rendu le 11 Janvier 2008


DEMANDEURS

Monsieur M. A... dit ASTON " FAMILYMAN " A....
16 Waterloo Avenue Kingston 10
(JAMAIQUE)

Monsieur M. Carlton A... (DECEDE le 17. 04. 1987) représenté par son exécuteur testamentaire, son frère AstonBARRET.
16 Waterloo Avenue Kingston 10
(JAMAIQUE)

Monsieur M. Glenroy ADAMSdit " Glen C... "
2021east, 41st Street, 4F Brooklyn
NEW YORK 11234 (USA)

Monsieur Alva B... LEWISou LEVIS (Intervenant volontaire)
Tun House
20 Mapple Leaf Mews
10 KINGSTON

représenté par Me André BERTRAND, avocat au barreau de PARIS, vestiaire L. 207


DÉFENDERESSES

S. A. R. L. PIASFRANCE prise en la personne de ses co- Gérants Mr Kenneth Gates et Philippe SAUSSUS
14 rue MILTON
75009 PARIS

représentée par Me Isabelle WEKSTEIN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire R. 58

SOCIETE SANCTUARY RECORDS GROUP (intervenant volontaire)
SANCTURAY HOUSE
45- 53 SINCLAIR ROAD
LONDON W14 ONS

représentée par Me Isabelle WEKSTEIN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire R. 58

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Véronique RENARD, Vice- Président, signataire de la décision
Sophie CANAS, Juge
Guillaume MEUNIER, Juge

assistée de Marie- Aline PIGNOLET, Greffier, signataire de la décision

DEBATS

A l' audience du 18 Octobre 2007
tenue en audience publique

JUGEMENT

Prononcé en audience publique
Contradictoire
en premier ressort

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Monsieur A... dit ASTON " FAMILYMAN " A..., Monsieur Carlton BARRET, Monsieur GlenroyADAMS dit " Glen C... " et Monsieur Alva B... LEWISou LEVIS ont fondé ensemble le groupe des " HIPPY BOYS ", devenu vers 1969 " THEUPSETTERS ", et issu de la fusion des groupes " SOULMATES " et " REGGAE BOYS ".

Ces quatre artistes jamaïcains exposent qu' ils ont participé entre 1969 et 1972 aux enregistrements du groupe de Bob MARLEYdénommé " THEWAILERS " et qu' ils ont rejoint définitivement ce groupe en 1972, jusqu' à la mort de Bob MARLEY.

Faisant valoir que depuis plus d' une trentaine d' années, des centaines de leurs enregistrements sont exploités sans leur autorisation, à l' origine par la société TROJAN, et depuis 2001 par la société SANCTUARY RECORS GROUP, son cessionnaire, et que les disques, compilations et coffrets comportant ces enregistrements sont importés en France par la société PIAS, qui les commercialise massivement sur le territoire français dans de nombreux magasins ainsi que sur le réseau internet, notamment via les sites www. alapage. com et www. fnac. com, Monsieur A... dit ASTON " FAMILYMAN " A..., Monsieur Carlton BARRET, représenté par son exécuteur testamentaire, son frère Monsieur Aston BARRET, et Monsieur GlenroyADAMS dit " Glen C... " ont, selon acte d' huissier en date du 04 octobre 2004, fait assigner la S. A. R. L. PIASFRANCE devant le Tribunal de Grande Instance de PARIS en contrefaçon de leurs droits d' auteur.

Par conclusions en date du 09 août 2005, la société SANCTUARY RECORDS GROUP est intervenue volontairement à l' instance.

Cette dernière a, selon acte d' huissier en date du 19 août 2005, assigné en intervention forcée Monsieur RAINFORDHUGH PERRY, dit LEE " SCRATCH " PERRY, producteur d' une grande partie des enregistrements litigieux sur la base d' un contrat conclu le 02 juin 1999 entre celui- ci et la société TROJAN RECORDING Ltd, aux droits de laquelle elle vient.

Ces procédures ont été jointes.

Suivant jugement rendu le 23 février 2006, le Tribunal de céans a fait droit à l' exception d' incompétence au profit de la High Court of Justice de LONDRES soulevée par Monsieur RAINFORDHUGH PERRY, a ordonné la disjonction de l' instance, et a pour le surplus renvoyé l' affaire devant le juge de la mise en état.

Monsieur Alva B... LEWISou LEVIS est intervenu volontairement à l' instance dans des conclusions en date du 31 mars 2006.

La société PIASFRANCE ayant soulevé in limine litis la nullité de l' acte introductif d' instance faute pour Monsieur Aston BARRETde qualité à agir au nom de son frère décédé Carlton BARRETet de production d' un certificat de coutume établissant le contenu de la loi jamaïcaine, le juge de la mise en état, par ordonnance rendue le 08 septembre 2006, a dit qu' il incombait à Monsieur Aston BARRETde justifier qu' il disposait, aux termes de la loi jamaïcaine, du pouvoir d' agir en justice pour la défense de la succession de son frère et a renvoyé l' affaire à cette fin à une audience de procédure ultérieure.

Suivant ordonnance en date du 25 mai 2007, le juge de la mise en état a donné acte aux sociétés PIASFRANCE et SANCTUARY RECORDS GROUP de ce qu' elles se désistaient de leur demande de nullité de l' assignation, les a condamnées à verser à chacun des demandeurs la somme de 20. 000 euros à titre de provision à valoir sur l' indemnisation de leur préjudice et a fait interdiction à la société PIASFRANCE de poursuivre la commercialisation en France des albums enregistrés par le groupe jamaïcain UPSETTERS sous astreinte de 100 euros par infraction constatée passé le délai de 30 jours à compter de la signification de la présente décision.

Dans leurs conclusions récapitulatives signifiées le 05 juin 2007, Monsieur A... dit ASTON " FAMILYMAN " A..., Monsieur A... en sa qualité d' exécuteur testamentaire de son frère, Carlton BARRET, décédé, Monsieur GlenroyADAMS dit " Glen C... " et Monsieur Alva B... LEWISou LEVIS demandent au Tribunal de :

- vu les pièces versées aux débats, DIRE ET JUGER qu' Aston BARRETTa qualité pour représenter la succession de son frère décédé Carlton A...,

- RECEVOIR les demandeurs, Mr. A... dit ASTON « FAMILY MAN » BARRETTà titre personnel et en sa qualité d' administrateur de la succession de son frère, Mr Carlton A..., décédé, Mr. GlenroyADAMS dit " Glen C... " et Mr Alva « Reggie » LEWISdans l' ensemble de leur action et de leurs demandes et déclarer celles- ci bien fondées,

Sur la compétence du tribunal de céans et sur l' application de la loi française,

- CONSTATER que les sociétés PIASet SANCTUARY RECORDS GROUP sont dans l' incapacité de produire un contrat d' Aston A..., de Carlton A..., de Glen ADAMSet / ou d' Alva LEWISautorisant l' exploitation de leurs enregistrements, ainsi que des enregistrements qu' ils ont réalisé en tant que membres des groupes SOULMATES, REGGAE BOYS, HIPPY BOYS, UPSETTERS et WAILERS,
- DIRE ET JUGER qu' en l' absence de clause attributive de juridiction les demandeurs peuvent à bon droit assigner devant le TGI de Paris sur le fondement des articles 42 et 46 alinéa 3 du NCPC, et des articles 5- 3o et 6 de la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968,
- DIRE ET JUGER qu' en l' absence de cession de droits par les demandeurs aucune « loi de cession » n' est applicable au litige, qui de nature purement délictuelle, relève de la loi française au regard des articles 17 et 18 de la loi du 3 Juillet 1985 (L. 212- 2 et L. 212- 3 du CPI), et de l' article 2 de la Convention de Rome de 1961,
Vu le jugement avant dire droit rendu le 23 Février par le tribunal de céans,
- CONFIRMER l' incompétence du tribunal de céans pour se prononcer sur le recours éventuel de SANCTUARY contre Lee PERRY,
- DIRE ET JUGER qu' en ce qui concerne un recours éventuel en garantie de la société SANCTUARY contre Lee « Scratch » Perry, dès lors que ce recours serait d' ordre contractuel et qu' il se trouve soumis à la loi anglaise et à la compétence de la High Court de Londres en vertu de l' article 15 du contrat qu' ils ont signé le 1er Juillet 1973,
Vu la Convention de Rome de 1961 relative à la protection des artistes interprètes ou exécutant et plus particulièrement ses articles 4 et 7,
Vu les articles L. 212- 3, L. 212- 4, L. 212- 5, L. 212- 9 et 335- 4 du Code de la propriété intellectuelle,
Vu les articles 9 et 1382 du Code Civil,
Vu les pièces versées aux débats,
- DIRE ET JUGER que les demandeurs, de nationalité jamaïcaine, sont bien fondés à faire interdire et sanctionner la commercialisation de leurs enregistrements, y compris ceux fixés avant 1994, sous forme d' albums et de compilations réalisés sans leur autorisation expresse,
- CONSTATER que la société TROJAN, puis depuis 2001 par son successeur en titre la société SANCTUARY ont exporté massivement d' Angleterre vers la France depuis plus de 25 ans, au moins une soixantaine d' albums, de compilations et / ou de coffret comportant au moins 542 enregistrements des demandeurs sur au moins 69 albums et / ou compilations sans l' autorisation de ces derniers,
- CONSTATER que la société PIASa depuis le 1er Mars 1996 soit depuis plus de 11 ans importé d' Angleterre et commercialisé en France, plus d' une soixantaine d' albums, de compilations et / ou de coffrets, comportant au moins 542 enregistrements des demandeurs sur au moins 69 albums et compilations, et ce sans l' autorisation de ces derniers,
- DIRE ET JUGER que la société PIASen sa qualité de professionnelle avait l' obligation de s' informer avant d' offrir les disques litigieux sur le marché, de la licéité des enregistrements en cause,
- DIRE ET JUGER qu' en vertu de l' article 1626 du Code civil, la société PIAS, distributeur d' un produit contrefaisant ne peut invoquer de garantie dans la mesure où en sa qualité de professionnel il ne pouvait ignorer que les produits étaient contrefaisants,
- DIRE ET JUGER qu' au regard de l' article 42. 2 de la Convention de Vienne du 11 avril 1980 sur les contrats internationaux de vente de marchandise, dans une vente internationale l' acheteur professionnel est supposé connaître le caractère contrefaisant de la marchandise,
- DIRE ET JUGER qu' en conséquence il convient de condamner les sociétés PIASet SANCTUARY RECORDS GOUP pour leurs actes distincts de contrefaçon sans que la première puisse obtenir la garantie de la seconde, mais pour éviter que la société SANCTUARY sise en Angleterre échappe au paiement des condamnations mises à sa charge, il conviendra de condamner ces deux sociétés solidairement,
- compte tenu de l' importance de ces exploitations illicites...

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