Ratification de l'avenant à la convention fiscale franco-luxembourgeoise : la fin d'une zone de non droit ?

AuteurNicolas Bousseau
Fonction Fiscaliste, Cridon Bordeaux Toulouse
Pages12-14

Page 12

Suivant le Grand Duché du Luxembourg de quelques jours, la France a ratifié le second avenant à la convention luxembourgeoise destiné à mettre fin à une situation de double exonération de gains et profits immobiliers qui s'éternisait au grand bonheur des investisseurs et des marchands de défiscalisation de tous bords. Cet avenant marque le retour au respect du principe général de droit fiscal international tendant à imposer les bénéfices de l'exploitation et de l'aliénation de l'immeuble dans l'Etat de situation de l'immeuble. Même si son impact sur les finances publiques françaises n'est pas à négliger, on peut regretter que la France se soit contentée du strict minimum.

I Rappel sur une situation rocambolesque propice à l'évasion fiscale :

L'article 244 bis A du CGI dispose que, sous réserve des conventions internationales, les personnes physiques non fiscalement domiciliées en France au sens de l'article 4 B, et les personnes morales ou organismes, quelle qu'en soit la forme, dont le siège est situé hors de France, sont soumis à un prélèvement d'un tiers sur les plus-values résultant de la cession d'immeubles, de droits immobiliers.

L'article 3 de la convention signée entre la France et le Luxembourg le 1er avril 1958 dispose que les revenus des biens immobiliers et de leurs accessoires, y compris les bénéfices des exploitations agricoles et forestières, ne sont imposables que dans l'État où les biens sont situés. Cette disposition s'applique également aux bénéfices provenant de l'aliénation desdits biens. S'agissant de bénéfices industriels et commerciaux, l'article 4 de cette même convention précise que ces revenus ne sont imposables en France que s'il existe un établissement stable en France.

Il en résulte de ces dispositions que la cession d'un bien immobilier en France par une société anonyme luxembourgeoise devrait, en application de l'article 3 de la convention, être imposable en France.

Or, le Conseil d'Etat (1) a considéré que la cession d'immeubles situés en France, par une société luxembourgeoise relevait, non pas des dispositions de l'article 3 de la convention, mais de l'article 4. Sur ce fondement, la haute juridiction considère que l'imposition n'est due en France, qu'en présence d'un établissement stable. La simple détention d'un immeuble ne pouvant pas constituer un établissement stable, ce revenu ne pouvait pas être imposé en France. Analysant l'arrêt de la haute juridiction, l'administration a précisé que ses conclusions « s'appliquent mutatis mutandi aux plus-values tirées de la cession d'immeubles » (2)

En pratique, cela signifie que de telles sociétés domiciliées au Luxembourg ne sont pas redevables du prélèvement du tiers prévu à l'article 244 bis A du CGI. Le Ministère des finances a, par la suite souligné que « l'exonération des prélèvements prévus par les articles 244 bis et 244 bis A du CGI vaut quel que soit le type de société domiciliée au Luxembourg, à l'exception notable toutefois des sociétés holdings au sens de la législation particulière luxembourgeoise dès lors que ces sociétés sont exclues du bénéfice de la convention fiscale du 1er avril 1958, modifiée par un échange de lettres en date du 8 septembre 1970 » (3) .

Prenant l'exact contre-pied (4) de la position arrêtée par la juridiction française, la Cour administrative luxembourgeoise (5) a jugé que les revenus de biens immobiliers situés en France dont une société luxembourgeoise est propriétaire ne peuvent pas être imposés au Luxembourg. La Cour estime, en effet, que l'article 3 de la convention est applicable et...

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