Décision judiciaire de Conseil Constitutionnel, 11 octobre 2013 (cas Loi organique relative à la transparence de la vie publique)

Date de Résolution11 octobre 2013
Estado de la SentenciaJORF du 12 octobre 2013 page 16838
Numéro de DécisionCSCL1325350S
JuridictionConstitutional Council (France)
Nature Contrôle de constitutionnalité des lois ordinaires, lois organiques, des traités, des règlements des Assemblées

Le Conseil constitutionnel a été saisi, le 18 septembre 2013, par le Premier ministre, conformément aux articles 46, alinéa 5, et 61, alinéa 1er, de la Constitution, de la loi organique relative à la transparence de la vie publique.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,

Vu la Constitution ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

Vu le code électoral ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu l'ordonnance n° 58-1099 du 17 novembre 1958 portant loi organique pour l'application de l'article 23 de la Constitution ;

Vu la loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962 relative à l'élection du Président de la République au suffrage universel ;

Vu la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie ;

Vu la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances ;

Vu la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française ;

Vu la loi organique n° 2010-837 du 23 juillet 2010 relative à l'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution ;

Vu la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique ;

Vu la loi relative à la transparence de la vie publique adoptée définitivement par le Parlement le 17 septembre 2013 ensemble la décision du Conseil constitutionnel n° 2013-676 DC du 9 octobre 2013 ;

Vu les observations présentées par cent un sénateurs et cent dix neuf députés enregistrées respectivement les 18 et 20 septembre 2013 ;

Vu les observations du Gouvernement, enregistrées le 27 septembre 2013 ;

Le rapporteur ayant été entendu ;

  1. Considérant que la loi organique soumise à l'examen du Conseil constitutionnel comporte seize articles ; qu'elle a été prise sur le fondement de l'article 6, du cinquième alinéa de l'article 13, de l'article 23, de l'article 25, du dix-huitième alinéa de l'article 34, de l'article 57, et des articles 74 et 77 de la Constitution ; que cette loi a été adoptée dans le respect des règles de procédure prévues par les trois premiers alinéas de l'article 46 de la Constitution ;

    - SUR LES DISPOSITIONS PRISES SUR LE FONDEMENT DE L'ARTICLE 6 DE LA CONSTITUTION :

  2. Considérant qu'en vertu de l'article 6 de la Constitution, une loi organique fixe les modalités de l'élection du Président de la République au suffrage universel direct ;

  3. Considérant que le paragraphe I de l'article 3 de la loi du 6 novembre 1962 susvisée prévoit, en particulier, que les candidats à l'élection présidentielle doivent, à peine de nullité de leur candidature, remettre au Conseil constitutionnel, sous pli scellé, une déclaration de leur situation patrimoniale conforme aux dispositions de l'article L.O. 135-1 du code électoral et l'engagement, en cas d'élection, de déposer deux mois au plus tôt et un mois au plus tard avant l'expiration de leur mandat, une nouvelle déclaration conforme à ces dispositions qui sera publiée au Journal officiel dans les huit jours de son dépôt ;

  4. Considérant que l'article 9 de la loi organique insère deux alinéas avant le dernier alinéa du paragraphe I de cet article 3 ; que le premier alinéa est relatif aux déclarations de situation patrimoniale des candidats à l'élection présidentielle ; qu'il prévoit que ces déclarations sont transmises à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique, qui les rend publiques au moins quinze jours avant le premier tour de scrutin dans les limites définies au paragraphe III de l'article L.O. 135-2 du code électoral ; qu'en vertu des mêmes dispositions, la Haute autorité peut assortir cette publication de toute appréciation qu'elle estime utile quant à l'exhaustivité, à l'exactitude et à la sincérité de la déclaration, après avoir mis à même l'intéressé de présenter ses observations ;

  5. Considérant que le second alinéa inséré par l'article 9 prévoit que la déclaration de situation patrimoniale remise par le Président de la République, à l'issue de ses fonctions, est transmise à la Haute autorité ; que si celle-ci « constate que cette déclaration n'est pas exhaustive, exacte ou sincère ou si elle constate une évolution de situation patrimoniale pour laquelle elle ne dispose pas d'explications suffisantes, elle rend public ce constat, après avoir mis à même l'intéressé de présenter ses observations » ;

  6. Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : « Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l'homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l'oppression » ; que la liberté proclamée par cet article implique le droit au respect de la vie privée ; que le dépôt de déclarations de situation patrimoniale qui contiennent des données à caractère personnel relevant de la vie privée, ainsi que la publicité dont peuvent faire l'objet ces déclarations, portent atteinte au respect de la vie privée ; que, pour être conformes à la Constitution, ces atteintes doivent être justifiées par un motif d'intérêt général et mises en oeuvre de manière adéquate et proportionnée à cet objectif ;

  7. Considérant que le législateur a prévu que doivent être rendues publiques, non seulement la déclaration de situation patrimoniale du Président de la République élu, mais aussi la déclaration de situation patrimoniale de tous les candidats à l'élection présidentielle ; qu'en prévoyant que les déclarations de situation patrimoniale remises par les candidats à cette élection sont transmises à la Haute autorité qui les rend publiques dans les limites prévues au paragraphe III de l'article L.O. 135-2 du code électoral, le législateur n'a pas, eu égard à la place du Président de la République dans les institutions et à la nature particulière de son élection, porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée des candidats à l'élection présidentielle ;

  8. Considérant que, toutefois, en retenant que la Haute autorité peut assortir la publication de la déclaration, qui intervient au moins quinze jours avant le premier tour de scrutin, de « toute appréciation qu'elle estime utile quant à l'exhaustivité, à l'exactitude et à la sincérité de la déclaration », le législateur a conféré à cette autorité le pouvoir d'intervenir dans la campagne électorale, dans les derniers jours de celle-ci, dans des conditions qui pourraient porter atteinte à l'égalité devant le suffrage ; que, par suite, la seconde phrase du cinquième alinéa du paragraphe I de l'article 3 de la loi du 6 novembre 1962 dans sa rédaction résultant du deuxième alinéa de l'article 9 de la loi déférée doit être déclarée contraire à la Constitution ; que, pour les mêmes motifs, doit être déclarée contraire à la Constitution la seconde phrase du sixième alinéa du paragraphe I de l'article 3 de la loi du 6 novembre 1962 dans sa rédaction résultant du troisième alinéa de l'article 9 de la loi déférée ;

  9. Considérant que les autres dispositions de l'article 9 ne méconnaissent aucune exigence constitutionnelle ;

    - SUR LES DISPOSITIONS PRISES SUR LE FONDEMENT DU CINQUIÈME ALINÉA DE L'ARTICLE 13 DE LA CONSTITUTION :

  10. Considérant qu'aux termes du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution : « Une loi organique détermine les emplois ou fonctions, autres que ceux mentionnés au troisième alinéa, pour lesquels, en raison de leur importance pour la garantie des droits et libertés ou la vie économique et sociale de la Nation, le pouvoir de nomination du Président de la République s'exerce après avis public de la commission permanente compétente de chaque assemblée. Le Président de la République ne peut procéder à une nomination lorsque l'addition des votes négatifs dans chaque commission représente au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions. La loi détermine les commissions permanentes compétentes selon les emplois ou fonctions concernés » ; que le tableau annexé à la loi organique du 23 juillet 2010 susvisée fixe la liste des emplois et fonctions pour lesquels le pouvoir de nomination du Président de la République s'exerce dans les conditions prévues par cet article 13 ;

  11. Considérant que l'article 8 de la loi organique modifie ce tableau en ajoutant la fonction de Président de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique aux emplois et fonctions pour lesquels le pouvoir de nomination du Président de la République s'exerce dans les conditions prévues par cet article 13 ; qu'eu égard à son importance pour la garantie des droits et des libertés, cette fonction entre dans le champ d'application du cinquième alinéa de l'article 13 de la Constitution ; que l'article 8 est conforme à la Constitution ;

    - SUR LES DISPOSITIONS PRISES SUR LE FONDEMENT DE L'ARTICLE 23 DE LA CONSTITUTION :

  12. Considérant qu'aux termes des deux premiers alinéas de l'article 23 de la Constitution : « Les fonctions de membre du Gouvernement sont incompatibles avec l'exercice de tout mandat parlementaire, de toute fonction de représentation professionnelle à caractère national et de tout emploi public ou de toute activité professionnelle.

    Une loi organique fixe les conditions dans lesquelles il est pourvu au remplacement des titulaires de tels mandats, fonctions ou emplois

    ;

  13. Considérant que l'article 7 de la loi organique modifie les articles 1er, 4 et 5 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 susvisée et abroge ses articles 6 et 7 ;

  14. Considérant que le 1° du paragraphe I de l'article 7 de la loi organique modifie le premier alinéa de l'article 1er de l'ordonnance précitée et prévoit que pendant le délai d'un mois à compter de sa nomination, le parlementaire devenu membre du Gouvernement « ne peut percevoir aucune indemnité en tant que parlementaire » ;

  15. Considérant que le 2° du paragraphe I de l'article 7 modifie l'article 4 de l'ordonnance précitée relatif à la position du titulaire d'un emploi public qui devient membre du Gouvernement et...

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