Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 2 mars 2021, 19-80.991, Publié au bulletin
Presiding Judge | M. Soulard (président) |
ECLI | ECLI:FR:CCASS:2021:CR00158 |
Case Outcome | Cassation partielle sans renvoi |
Counsel | SCP Waquet,Farge et Hazan |
Appeal Number | C2100158 |
Docket Number | 19-80991 |
Court | Chambre Criminelle (Cour de Cassation de France) |
Date | 02 mars 2021 |
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° B 19-80.991 F-P+B+I
N° 00158
SM12
2 MARS 2021
CASSATION PARTIELLE SANS RENVOI
M. SOULARD président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 2 MARS 2021
M. H... P... et Mme I... B..., épouse P..., ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel de Rennes, 12e chambre, en date du 13 décembre 2018, qui, a condamné le premier, pour complicité de travail dissimulé et recel d'abus de biens sociaux, à huit mois d'emprisonnement avec sursis, 45 000 euros d'amende et cinq ans d'interdiction professionnelle, la seconde, pour travail dissimulé, prêt illicite de main d'oeuvre, faux et usage et abus de biens sociaux, à un an d'emprisonnement avec sursis, 45 000 euros d'amende, cinq ans d'interdiction professionnelle et ordonné des mesures de confiscation, et a prononcé sur les intérêts civils.
Les pourvois sont joints en raison de la connexité.
Un mémoire, commun aux demandeurs, et des observations complémentaires, ont été produits.
Sur le rapport de M. Maziau, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. H... P... et Mme I... B... épouse P..., et les conclusions de M. Quintard, avocat général, après débats en l'audience publique du 12 janvier 2021 où étaient présents M. Soulard, président, M. Maziau, conseiller rapporteur, M. Bonnal, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Courant 2011, le procureur de la République de Saint-Malo a diligenté une enquête préliminaire sur des faits d'exercice illégal en France d'une activité d'entreprise de travail temporaire à l'encontre de la société Mistral intérim, de nationalité slovaque.
3. L'enquête, initialement ouverte pour travail dissimulé, a été élargie aux infractions d'abus de biens sociaux et de faux et usage.
4. Au terme de ces investigations, le 5 juillet 2013, le procureur de la République a fait citer devant le tribunal correctionnel la gérante de l'entreprise Mistral, Mme B..., épouse P... et son mari M. P... pour des faits de travail dissimulé, prêt illicite de main d'oeuvre, faux et usage et abus de biens sociaux, outre un délit de marchandage reproché uniquement à M. P....
5. Par jugement en date du 12 novembre 2013, le tribunal a annulé la citation délivrée à Mme P... et relaxé M. P....
6. Le ministère public et M. V... X..., en qualité de mandataire judiciaire de la société Mistral, partie civile, ont relevé appel de cette décision.
7. A nouveau saisi contre Mme P..., le tribunal correctionnel, par jugement en date du 7 janvier 2016, l'a relaxée du chef de prêt illicite de main d'oeuvre et déclarée coupable d'abus de biens sociaux, de faux et usage et de travail dissimulé.
8. Le ministère public, la prévenue et la société partie civile ont relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur le troisième moyen
9. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
10. Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré Mme P... coupable de travail dissimulé par dissimulation d'activité, par dissimulation de salarié pour défaut de remise de déclaration préalable à l'embauche et pour minoration du nombre d'heure de travail, de prêt de main d'oeuvre illicite et d'avoir déclaré M. P... coupable de complicité de travail dissimulé par dissimulation d'activité, par dissimulation de salarié pour défaut de remise de déclaration préalable à l'embauche et pour minoration du nombre d'heure de travail, alors :
« 1°/ que lorsqu'il est saisi de poursuites pénales du chef de travail dissimulé, pour défaut de déclarations aux organismes de protection sociale, et que la personne poursuivie produit des certificats E101, devenus A1, à l'égard des travailleurs concernés, délivrés au titre de l'article 14, paragraphe 2, sous a), du règlement n° 1408/71, le juge, à l'issue du débat contradictoire, ne peut écarter lesdits certificats que si, sur la base de l'examen des éléments concrets recueillis au cours de l'enquête judiciaire ayant permis de constater que ces certificats avaient été obtenus ou invoqués frauduleusement et que l'institution émettrice saisie s'était abstenue de prendre en compte, dans un délai raisonnable, il caractérise une fraude constituée, dans son élément objectif par l'absence de respect des conditions prévues à la disposition précitée et, dans son élément subjectif, par l'intention de la personne poursuivie de contourner ou d'éluder les conditions de délivrance dudit certificat pour obtenir l'avantage qui y est attaché ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que les prévenus produisaient des certificats A1 émis par les autorités slovaques attestant que les travailleurs détachés par elle en France disposaient d'une protection sociale dans leur pays d'origine ; qu'en les condamnant néanmoins pour travail dissimulé pour défaut de déclaration aux organismes de sécurité sociale français et complicité de cette infraction, sans constater l'existence d'une fraude dans les conditions et selon la procédure décrite par les arrêts susvisés, la cour d'appel a violé l'article 14, paragraphe 2, sous a), du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non-salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement (CE) n° 118/97 du Conseil, du 2 décembre 1996, tel que modifié par le règlement (CE) n° 647/2005 du Parlement européen et du Conseil, du 13 avril 2005, et l'article 12 bis, point 1 bis, du règlement (CEE) n° 574/72 du Conseil, du 21 mars 1972, fixant les modalités d'application du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, susvisé, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement (CE) n° 118/97 du Conseil, précité, tel que modifié par le règlement (CE) n° 647/2005 du Parlement européen et du Conseil, dans leur rédaction applicable en la cause et l'article 593 du code de procédure pénale ;
2°/ qu'un certificat E 101 délivré par l'institution désignée par l'autorité compétente d'un État membre, au titre de l'article 14, paragraphe 1 et paragraphe 2, sous b), du règlement n° 1408/71, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement n° 118/97, tel que modifié par le règlement (CE) n° 647/2005 du Parlement européen et du Conseil, du 13 avril 2005, ou A 1 délivré au titre de l'article 13, paragraphe 1, du règlement, n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale, lie les juridictions de l'Etat membre dans lequel le travail est effectué pour déterminer la législation applicable, non seulement au régime de sécurité sociale, mais aussi au droit du travail, lorsque cette législation définit les obligations des employeurs et les droits des salariés, de sorte qu'à l'issue du débat contradictoire, elles ne peuvent écarter lesdits certificats que si, sur la base de l'examen des éléments concrets recueillis au cours de l'enquête judiciaire ayant permis de constater que ces certificats avaient été obtenus ou invoqués frauduleusement et que l'institution émettrice saisie s'était abstenue de prendre en compte, dans un délai raisonnable, ces juridictions caractérisent une fraude constituée, dans son élément objectif par l'absence de respect de conditions prévues à l'une ou l'autre des dispositions précitées des règlements (CEE) n° 574/72 du Conseil, du 21 mars 1972, fixant les modalités d'application du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971 et (CE) n° 987/2009 du Parlement européen et du Conseil, du 16 septembre 2009, fixant les...
N° B 19-80.991 F-P+B+I
N° 00158
SM12
2 MARS 2021
CASSATION PARTIELLE SANS RENVOI
M. SOULARD président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 2 MARS 2021
M. H... P... et Mme I... B..., épouse P..., ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel de Rennes, 12e chambre, en date du 13 décembre 2018, qui, a condamné le premier, pour complicité de travail dissimulé et recel d'abus de biens sociaux, à huit mois d'emprisonnement avec sursis, 45 000 euros d'amende et cinq ans d'interdiction professionnelle, la seconde, pour travail dissimulé, prêt illicite de main d'oeuvre, faux et usage et abus de biens sociaux, à un an d'emprisonnement avec sursis, 45 000 euros d'amende, cinq ans d'interdiction professionnelle et ordonné des mesures de confiscation, et a prononcé sur les intérêts civils.
Les pourvois sont joints en raison de la connexité.
Un mémoire, commun aux demandeurs, et des observations complémentaires, ont été produits.
Sur le rapport de M. Maziau, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. H... P... et Mme I... B... épouse P..., et les conclusions de M. Quintard, avocat général, après débats en l'audience publique du 12 janvier 2021 où étaient présents M. Soulard, président, M. Maziau, conseiller rapporteur, M. Bonnal, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. Courant 2011, le procureur de la République de Saint-Malo a diligenté une enquête préliminaire sur des faits d'exercice illégal en France d'une activité d'entreprise de travail temporaire à l'encontre de la société Mistral intérim, de nationalité slovaque.
3. L'enquête, initialement ouverte pour travail dissimulé, a été élargie aux infractions d'abus de biens sociaux et de faux et usage.
4. Au terme de ces investigations, le 5 juillet 2013, le procureur de la République a fait citer devant le tribunal correctionnel la gérante de l'entreprise Mistral, Mme B..., épouse P... et son mari M. P... pour des faits de travail dissimulé, prêt illicite de main d'oeuvre, faux et usage et abus de biens sociaux, outre un délit de marchandage reproché uniquement à M. P....
5. Par jugement en date du 12 novembre 2013, le tribunal a annulé la citation délivrée à Mme P... et relaxé M. P....
6. Le ministère public et M. V... X..., en qualité de mandataire judiciaire de la société Mistral, partie civile, ont relevé appel de cette décision.
7. A nouveau saisi contre Mme P..., le tribunal correctionnel, par jugement en date du 7 janvier 2016, l'a relaxée du chef de prêt illicite de main d'oeuvre et déclarée coupable d'abus de biens sociaux, de faux et usage et de travail dissimulé.
8. Le ministère public, la prévenue et la société partie civile ont relevé appel de cette décision.
Examen des moyens
Sur le troisième moyen
9. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
10. Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré Mme P... coupable de travail dissimulé par dissimulation d'activité, par dissimulation de salarié pour défaut de remise de déclaration préalable à l'embauche et pour minoration du nombre d'heure de travail, de prêt de main d'oeuvre illicite et d'avoir déclaré M. P... coupable de complicité de travail dissimulé par dissimulation d'activité, par dissimulation de salarié pour défaut de remise de déclaration préalable à l'embauche et pour minoration du nombre d'heure de travail, alors :
« 1°/ que lorsqu'il est saisi de poursuites pénales du chef de travail dissimulé, pour défaut de déclarations aux organismes de protection sociale, et que la personne poursuivie produit des certificats E101, devenus A1, à l'égard des travailleurs concernés, délivrés au titre de l'article 14, paragraphe 2, sous a), du règlement n° 1408/71, le juge, à l'issue du débat contradictoire, ne peut écarter lesdits certificats que si, sur la base de l'examen des éléments concrets recueillis au cours de l'enquête judiciaire ayant permis de constater que ces certificats avaient été obtenus ou invoqués frauduleusement et que l'institution émettrice saisie s'était abstenue de prendre en compte, dans un délai raisonnable, il caractérise une fraude constituée, dans son élément objectif par l'absence de respect des conditions prévues à la disposition précitée et, dans son élément subjectif, par l'intention de la personne poursuivie de contourner ou d'éluder les conditions de délivrance dudit certificat pour obtenir l'avantage qui y est attaché ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que les prévenus produisaient des certificats A1 émis par les autorités slovaques attestant que les travailleurs détachés par elle en France disposaient d'une protection sociale dans leur pays d'origine ; qu'en les condamnant néanmoins pour travail dissimulé pour défaut de déclaration aux organismes de sécurité sociale français et complicité de cette infraction, sans constater l'existence d'une fraude dans les conditions et selon la procédure décrite par les arrêts susvisés, la cour d'appel a violé l'article 14, paragraphe 2, sous a), du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971, relatif à l'application des régimes de sécurité sociale aux travailleurs salariés, aux travailleurs non-salariés et aux membres de leur famille qui se déplacent à l'intérieur de la Communauté, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement (CE) n° 118/97 du Conseil, du 2 décembre 1996, tel que modifié par le règlement (CE) n° 647/2005 du Parlement européen et du Conseil, du 13 avril 2005, et l'article 12 bis, point 1 bis, du règlement (CEE) n° 574/72 du Conseil, du 21 mars 1972, fixant les modalités d'application du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, susvisé, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement (CE) n° 118/97 du Conseil, précité, tel que modifié par le règlement (CE) n° 647/2005 du Parlement européen et du Conseil, dans leur rédaction applicable en la cause et l'article 593 du code de procédure pénale ;
2°/ qu'un certificat E 101 délivré par l'institution désignée par l'autorité compétente d'un État membre, au titre de l'article 14, paragraphe 1 et paragraphe 2, sous b), du règlement n° 1408/71, dans sa version modifiée et mise à jour par le règlement n° 118/97, tel que modifié par le règlement (CE) n° 647/2005 du Parlement européen et du Conseil, du 13 avril 2005, ou A 1 délivré au titre de l'article 13, paragraphe 1, du règlement, n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale, lie les juridictions de l'Etat membre dans lequel le travail est effectué pour déterminer la législation applicable, non seulement au régime de sécurité sociale, mais aussi au droit du travail, lorsque cette législation définit les obligations des employeurs et les droits des salariés, de sorte qu'à l'issue du débat contradictoire, elles ne peuvent écarter lesdits certificats que si, sur la base de l'examen des éléments concrets recueillis au cours de l'enquête judiciaire ayant permis de constater que ces certificats avaient été obtenus ou invoqués frauduleusement et que l'institution émettrice saisie s'était abstenue de prendre en compte, dans un délai raisonnable, ces juridictions caractérisent une fraude constituée, dans son élément objectif par l'absence de respect de conditions prévues à l'une ou l'autre des dispositions précitées des règlements (CEE) n° 574/72 du Conseil, du 21 mars 1972, fixant les modalités d'application du règlement (CEE) n° 1408/71 du Conseil, du 14 juin 1971 et (CE) n° 987/2009 du Parlement européen et du Conseil, du 16 septembre 2009, fixant les...
Pour continuer la lecture
SOLLICITEZ VOTRE ESSAI