Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 20 février 2019, 17-31.065, Publié au bulletin

Presiding JudgeMme Batut
ECLIECLI:FR:CCASS:2019:C100114
CitationN1 >A rapprocher :1re Civ., 3 mai 2018, pourvoi n° 17-13.593, Bull. 2019, I, n° ??? (rejet), et les arrêts cités.Cf. :CJUE, arrêt du 20 septembre 2017, OTP Bank Nyrt., C
Case OutcomeRejet
Docket Number17-31065
Appeal Number11900114
Date20 février 2019
CounselSCP Rocheteau et Uzan-Sarano,Me Goldman
CourtPremière Chambre Civile (Cour de Cassation de France)
Subject MatterUNION EUROPEENNE - Protection des consommateurs - Directive 93/13/CEE du Conseil du 5 avril 1993 - Article 4, § 2 - Clauses abusives - Domaine d'application - Exclusion - Clause portant sur l'objet principal du contrat - Conditions - Clause rédigée de façon claire et compréhensible - Cas - Clause relative au risque de change - Informations à donner au consommateur - Contenu
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :



Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 12 mai 2017), que, suivant offre de prêt acceptée le 3 juillet 2008, la société BNP Paribas Personal Finance (la banque) a consenti à Mme H... (l'emprunteur) un prêt libellé en francs suisses et remboursable en euros, dénommé Helvet immo, en vue de financer l'acquisition d'un bien immobilier ; qu'invoquant l'irrégularité de la clause contractuelle relative à l'indexation du prêt sur la valeur du franc suisse ainsi qu'un manquement de la banque à son obligation d'information, l'emprunteur a assigné celle-ci en annulation de la clause litigieuse et en indemnisation ;

Sur le premier moyen :

Attendu que l'emprunteur fait grief à l'arrêt de valider la clause litigieuse, alors, selon le moyen :

1°/ que la clause de monnaie de compte selon laquelle les versements mensuels de l'emprunteur, réalisés en euros, sont convertis dans une devise étrangère afin de procéder au remboursement du capital emprunté dans cette devise, constitue une clause d'indexation qui n'est que l'accessoire de l'obligation de remboursement en euros, prestation essentielle du contrat ; que la cour d'appel qui, après avoir relevé que les échéances du prêt litigieux devaient être payées en euros avant conversion en francs suisses afin de permettre le remboursement du capital emprunté dans cette devise, ce dont il résultait que cette clause d'indexation n'était qu'un accessoire de la prestation essentielle du contrat, a néanmoins retenu, pour refuser d'examiner le caractère abusif de celle-ci, qu'elle définissait l'objet principal du contrat, a violé l'article L. 132-1, devenu L. 212-1, du code de la consommation ;

2°/ qu'en tout état de cause, une clause définissant la prestation essentielle du contrat peut être regardée comme abusive lorsqu'elle n'est pas rédigée de manière claire et compréhensible ; qu'en se bornant à se référer, pour juger que la clause de monnaie de compte était claire et compréhensible, à la clarté et la précision des termes employés pour décrire le mécanisme de prêt, qui n'aurait présenté aucun caractère de complexité, ainsi qu'à leur répétition et leur caractère compréhensible, c'est-à-dire au caractère intelligible de la clause sur un plan grammatical, sans rechercher si, notamment à l'aide d'exemples chiffrés, le contrat exposait de manière transparente le fonctionnement concret du mécanisme de conversion de la devise étrangère auquel se référait la clause litigieuse, de sorte que l'emprunteur fût mis en mesure d'évaluer, sur le fondement de critères précis et intelligibles, les conséquences économiques qui en découlaient pour lui, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 132-1, devenu L. 212-1, du code de la consommation ;

3°/ que la clause d'indexation prévoyait que, à raison de l'évolution du taux de change euro/franc suisse, les échéances de remboursement en euros pouvaient augmenter sans limitation durant les cinq dernières années du prêt, afin que celui-ci soit apuré à l'issue de cette période ; qu'en retenant néanmoins que le contrat fixait une double limite, de la durée supplémentaire, qui ne peut être que de cinq ans et de la majoration des règlements en euros qui ne peut être supérieure à l'augmentation annuelle de l'indice INSEE des prix à la consommation (série France entière hors tabac)sur la période des cinq dernières années précédant la révision du taux d'intérêt, la cour d'appel a violé l'obligation faite au juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;

Mais attendu, d'abord, qu'après avoir énoncé que l'appréciation du caractère abusif des clauses, au sens du premier alinéa de l'article L. 132-1, devenu L. 212-1 du code de la consommation, ne porte pas sur la définition de l'objet principal du contrat pour autant que ces clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible, l'arrêt relève que l'offre préalable de prêt, dans laquelle s'insère la clause litigieuse, prévoit la conversion en francs suisses du solde des règlements mensuels en euros après paiement des charges annexes du crédit, que le prêt a pour caractéristique essentielle d'être un prêt en francs suisses remboursable en euros et que le risque de change, inhérent à ce type de prêt, a une incidence sur les conditions de remboursement du crédit ; qu'il en déduit, à bon droit, que la clause définit l'objet principal du contrat ;

Attendu, ensuite, que la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit (arrêt du 20 septembre 2018, C-51/17) que l'article 4, § 2, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens que l'exigence selon laquelle une clause contractuelle doit être rédigée de manière claire et compréhensible oblige les établissements financiers à fournir aux emprunteurs des informations suffisantes pour permettre à ceux-ci de prendre leurs décisions avec prudence et en toute connaissance de cause ; que cette exigence implique qu'une clause relative au risque de change soit comprise par le consommateur à la fois sur les plans formel et grammatical, mais également quant à sa portée concrète, en ce sens qu'un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, puisse non seulement avoir conscience de la possibilité de dépréciation de la monnaie nationale par rapport à la devise étrangère dans laquelle le prêt a été libellé, mais aussi évaluer les conséquences économiques, potentiellement significatives, d'une telle clause sur ses obligations financières ;

Attendu que l'arrêt relève que l'offre préalable de prêt détaille les opérations de change réalisées au cours de la vie du crédit et précise que le taux de change euros contre francs suisses sera celui applicable deux jours ouvrés avant la date de l'événement qui détermine l'opération et qui est publié sur le site de la Banque centrale européenne ; qu'il constate qu'il est mentionné dans l'offre que l'emprunteur accepte les opérations de change de francs suisses en euros et d'euros en francs suisses nécessaires au fonctionnement et au remboursement du crédit, et que le prêteur opérera la conversion en francs suisses du solde des règlements mensuels en euros après paiement des charges annexes du crédit ; qu'il énonce que l'offre indique que, s'il résulte de l'opération de change une somme inférieure à l'échéance en francs suisses exigible, l'amortissement du capital sera moins rapide et l'éventuelle part de capital non amorti au titre d'une échéance sera inscrite au solde débiteur du compte en francs suisses, et qu'il est précisé que l'amortissement du capital du prêt évoluera en fonction des variations du taux de change appliqué aux règlements mensuels, à la hausse ou à la baisse, que cette évolution peut entraîner l'allongement ou la réduction de la durée d'amortissement du prêt et, le cas échéant, modifier la charge totale de remboursement ; que l'arrêt ajoute que les articles "compte interne en euros" et "compte interne en francs suisses" détaillent les opérations effectuées à chaque paiement d'échéance au crédit et au débit...

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