Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 6 juin 2018, 17-14.372 17-14.373 17-14.374 17-14.375, Publié au bulletin

Presiding JudgeM. Frouin
ECLIECLI:FR:CCASS:2018:SO00927
Case OutcomeRejet
Publication au Gazette officielBull. 2018, V, n° 102
CitationSur l'impossibilité d'exclure des salariés détachés à l'étranger des dispositifs de participation et d'intéressement, à rapprocher :Soc., 29 octobre 2002, pourvoi n° 00-14.787, Bull. 2002, V, n° 324 (cassation), et l'arrêt cité.
Date06 juin 2018
Docket Number17-14374,17-14375,17-14372,17-14373
CounselSCP Thouvenin,Coudray et Grévy,SCP Lévis
CourtChambre Sociale (Cour de Cassation de France)
Appeal Number51800927
Subject MatterCONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Salaire - Participation aux résultats de l'entreprise - Réserve spéciale de participation - Répartition - Bénéficiaires CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Salaire - Participation aux résultats de l'entreprise - Intéressement - Accord d'intéressement - Clause excluant une catégorie de salariés - Nature de la clause - Portée CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Salaire - Participation aux résultats de l'entreprise - Intéressement - Répartition - Bénéficiaires
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :



Vu la connexité, joint les pourvois n° Y 17-14.372 à B 17-14.375 ;

Attendu, selon les arrêts attaqués (Paris, 8 décembre 2016), qu'engagés par la société BNP Paribas, MM. X..., Z..., A... et Y... ont été affectés, pendant des périodes comprises entre 1997 et 2012, dans des succursales situées à Londres, Singapour ou New York ; qu'au cours de l'année 2014, les salariés ont saisi le tribunal de grande instance de demandes en paiement de diverses sommes à titre de participation et d'intéressement ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société fait grief aux arrêts de la condamner à payer aux salariés diverses sommes à titre de participation, alors, selon le moyen, qu'un accord de participation peut prévoir que le salarié d'une entreprise française, dont le travail s'exécute à l'étranger et dont la rémunération est versée directement par l'entité d'accueil située à l'étranger, ne bénéficie pas du régime de participation ; qu'en retenant que la clause excluant du bénéfice des accords de participation les salariés détachés dans une entité située à l'étranger et rémunérés directement par cette entité d'accueil était illicite, la cour d'appel a violé les articles L. 3322-1, L. 3322-2 et L. 3342-1 du code du travail ;

Mais attendu qu'il résulte de l'article L. 3342-1 du code du travail que tous les salariés de l'entreprise où a été conclu un accord de participation doivent avoir la possibilité de bénéficier de la répartition des résultats de l'entreprise, sans que puisse leur être opposé le fait qu'ils n'exécutent pas leur activité en France ou qu'ils n'y sont pas rémunérés ; que la clause d'un accord de participation excluant les salariés détachés à l'étranger dans une succursale est réputée non écrite ;

Et attendu qu'ayant constaté que les salariés n'avaient jamais cessé d'appartenir à l'effectif de la société BNP Paribas durant leur période de détachement dans les succursales concernées, la cour d'appel a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que la société fait grief aux arrêts de la condamner à payer aux salariés diverses sommes à titre d'intéressement, alors, selon le moyen, qu'un accord d'intéressement peut prévoir que le salarié d'une entreprise française, dont le travail s'exécute à l'étranger et dont la rémunération est versée directement par l'entité d'accueil située à l'étranger, ne bénéficie pas du régime d'intéressement ; qu'en retenant que la clause excluant du bénéfice des accords d'intéressement les salariés détachés dans une entité située à l'étranger et rémunérés directement par cette entité d'accueil était illicite, la cour d'appel a violé les articles L. 3312-1, L. 3312-2 et L. 3342-1 du code du travail ;

Mais attendu qu'il résulte de l'article L. 3342-1 du code du travail que tous les salariés de l'entreprise où a été conclu un accord d'intéressement doivent avoir la possibilité de bénéficier de la répartition des résultats de l'entreprise, sans que puisse leur être opposé le fait qu'ils n'exécutent pas leur activité en France ou qu'ils n'y sont pas rémunérés ; que la clause d'un accord d'intéressement excluant les salariés détachés à l'étranger dans une succursale est réputée non écrite ;

Et attendu qu'ayant constaté que les salariés n'avaient jamais cessé d'appartenir à l'effectif de la société BNP Paribas durant leur période de détachement dans les succursales concernées, la cour d'appel a, par ces seuls motifs, abstraction faite des motifs erronés mais surabondants tenant à l'application du principe d'égalité de traitement, légalement justifié sa décision ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le troisième moyen ci-après annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne la société BNP Paribas aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme globale de 3 000 euros aux salariés ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six juin deux mille dix-huit.


MOYENS ANNEXES au présent arrêt.

Moyens produits au pourvoi n° Y 17-14.372 par la SCP Lévis, avocat aux Conseils, pour la société BNP Paribas.

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société BNP Paribas à verser à M. X... les sommes de 945,33 euros, 4.846 euros, 6.764 euros, 6.917 euros, 8.280 euros, 7.964 euros, 1. 282 euros, 3.580 euros, 5.743 euros, 4.376 euros et 810,33 euros à titre de participation pour les exercices 2002 à 2012 avec intérêts au taux légal à compter du 9 avril 2014, capitalisés dans les conditions légales ;

AUX MOTIFS QUE l'article L. 3322-1 du code du travail dispose : « la participation a pour objet de garantir collectivement aux salariés le droit de participer aux résultats de l'entreprise. Elle prend la forme d'une participation financière à effet différé, calculée en fonction du bénéfice net de l'entreprise, constituant la réserve spéciale de participation. Elle est obligatoire dans les entreprises mentionnées au présent chapitre. Elle concourt à la mise en oeuvre de la gestion participative dans l'entreprise » ; que l'article L. 3312-1 du même code dispose : « l'intéressement a pour objet d'associer collectivement les salariés aux résultats ou aux performances de l'entreprise. Il présente un caractère aléatoire et résulte d'une formule de calcul liée à ces résultats ou performances. Il est facultatif » ; que l'article L. 3312-2 dispose :
« toute entreprise qui satisfait aux obligations incombant à l'employeur en matière de représentation du personnel peut instituer, par voie d'accord, un intéressement collectif des salariés. Le salarié d'un groupement d'employeurs peut bénéficier du dispositif d'intéressement mis en place dans chacune des entreprises adhérentes du groupement auprès de laquelle il est mis à disposition dans des conditions fixées par décret » ; qu'en application des dispositions de l'article L 3342-1, « tous les salariés d'une entreprise compris dans le champ des accords d'intéressement et de participation ou des plans d'épargne salariale bénéficient de leurs dispositions. Toutefois, une condition d'ancienneté dans l'entreprise ou dans le groupe d'entreprises défini aux articles L 3344-1 et L 3344-2 peut être exigée. Elle ne peut excéder trois mois. (
) » ; que l'article 444-4 en vigueur avant le 1er mai 2008 prévoyait des dispositions similaires : « tous les salariés d'une entreprise compris dans le champ des accords d'intéressement et de participation prévus aux chapitres Ier et II du présent titre ou des plans d'épargne prévus au chapitre III du même titre doivent pouvoir bénéficier de leurs dispositions. Toutefois, une condition d'ancienneté dans l'entreprise ou dans le groupe défini à l'article L. 444-3 peut être exigée. Elle ne peut excéder trois mois » ; que la société BNP PARIBAS fait essentiellement valoir que le non-versement de la participation et de l'intéressement pendant la période d'affectation à l'étranger de M. Antoine X... résulte des dispositions des accords conclus au sein du groupe BNP PARIBAS portant sur la participation et l'intéressement, qui excluent de leur champ d'application les salariés affectés et rémunérés à l'étranger ; qu'elle souligne en outre le caractère facultatif du dispositif de l'intéressement, mis en place par un accord collectif d'entreprise qui est opposable aux salariés et s'impose au juge ; que s'agissant du dispositif de participation, il ressort des accords conclus au sein du groupe BNP PARIBAS les 30 juin 2000, 29 juin 2005, 30 juin 2009 et 30 juin 2010 (pièces n° 29, 17, 19 et 21 de l'appelante) que n'en bénéficient pas les salariés détachés par une entité signataire auprès d'une entité non signataire lorsque leur contrat de travail avec l'entité signataire est suspendu et qu'ils sont rémunérés par l'entité non signataire, le terme « entité » devant « être entendu au sens large et comprendre, sauf mentions contraires, toutes entités juridiques (sociétés de droit français, GIE, succursales, associations ou autres organismes) » ; que toutefois, il résulte des dispositions légales susvisées, qui sont d'ordre public absolu, que sous réserve d'une durée minimale d'ancienneté dans l'entreprise, la seule condition pour bénéficier du dispositif de participation est d'appartenir à l'effectif de l'entreprise, de sorte que le salarié détaché à l'étranger ne peut en être exclu et que doit être réputée non écrite la clause d'un accord collectif de participation qui, comme en l'espèce, en subordonne le bénéfice à une condition de territorialité, c'est-à-dire que le salarié exécute son travail en France ou qu'il soit rémunéré en France ; qu'au cas présent, il est justifié et non contesté que M. Antoine X... a toujours appartenu à l'effectif de la société BNP PARIBAS durant son détachement dans les succursales de cette dernière, à Londres puis à Singapour, ainsi qu'il ressort de ses différents avenants d'affectation à l'étranger, le premier en date du 20 août 2002 et le dernier en date du 13 octobre 2010 stipulant que "les termes et conditions de [son] contrat avec BNP Paribas S.A. continueront à s'appliquer pendant la durée de [son] détachement "sous réserve de la politique d'"expatriation" en vigueur au sein du groupe BNP PARIBAS et des conditions particulières desdits avenants ; qu'il importe peu dans ces conditions que M. Antoine X... ait exécuté son contrat de travail à l'étranger dans une succursale qui le rémunérait directement et que sa rémunération n'ait le cas échéant pas été prise en compte pour le calcul de la réserve spéciale de participation — étant observé à cet égard que selon le document relatif au périmètre de consolidation du groupe BNP PARIBAS constituant la pièce n° 20 de l'intimé les résultats des succursales de la société BNP PARIBAS à Londres et à Singapour...

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