Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 9 juin 2015, 14-15.074 14-15.123 14-15.592, Publié au bulletin

Presiding JudgeMme Mouillard
ECLIECLI:FR:CCASS:2015:CO00576
CitationSur le n° 2 : Cf. :CJCE, arrêt du 14 décembre 1995, Van Schijndel, C-430/93 et C-431/93
Case OutcomeRejet
Date09 juin 2015
Docket Number14-15592,14-15123,14-15074
CounselSCP Masse-Dessen,Thouvenin et Coudray,SCP Piwnica et Molinié,SCP Spinosi et Sureau
Appeal Number41500576
CourtChambre Commerciale, Financière et Économique (Cour de Cassation de France)

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Vu leur connexité, joint les pourvois n° C 14-15. 123 et N 14-15. 592 formés par la société Axa Corporate Solutions Assurance (la société Axa), et n° Z 14-15. 074 formé par la société Electricité réseau distribution France (la société ERDF) ;

Sur la déchéance du pourvoi n° C 14-15. 123, soulevée d'office, après avertissement délivré aux parties, en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt rendu le 4 juin 2013 :

Vu l'article 978, alinéa 1er, du code de procédure civile ;

Attendu qu'aucun grief n'étant formulé contre l'arrêt du 4 juin 2013, il y a lieu de constater la déchéance partielle du pourvoi en ce qu'il est dirigé contre cet arrêt ;

Sur le pourvoi n° C 14-15. 123 en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt rendu le 11 février 2014 et sur les pourvois n° N 14-15. 592 et Z 14-15. 074 :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 11 février 2014, RG : n° 11/ 09047), qu'estimant que la société ERDF avait commis une faute à son égard lors du traitement de sa demande de raccordement de son installation photovoltaïque au réseau public de distribution d'électricité, la société Green Yellow Hyères Sup (la société Green Yellow) l'a assignée pour obtenir la poursuite de la procédure de raccordement sous astreinte et subsidiairement le paiement de dommages-intérêts ; que la société Axa, assureur responsabilité civile professionnelle de la société ERDF, a été appelée en garantie par son assuré ;

Sur les premiers moyens des pourvois n° C 14-15. 123 et N 14-15. 592, rédigés en termes identiques, réunis :

Attendu que la société Axa fait grief à l'arrêt de retenir la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire alors, selon le moyen, que les juridictions administratives sont compétentes pour connaître du litige né du refus d'exécuter les travaux nécessaires pour raccorder un demandeur au réseau de distribution de l'électricité ; que l'opération de raccordement, en ce qui concerne la phase préalable à l'entrée dans une relation contractuelle de droit privé, a trait au fonctionnement d'un ouvrage public ; que les tiers victimes d'un dommage de travaux publics, résultant de l'exploitation d'un ouvrage public, doivent porter leur litige à la connaissance de la juridiction administrative, quand bien même l'ouvrage serait exploité par une personne de droit privé chargée d'une mission de service public industriel et commercial ; que dès lors la période d'instruction de la demande de « proposition technique et financière » (PTF) relève de la sphère administrative quand les phases de conclusion et d'exécution du contrat de raccordement relèvent de la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire ; qu'en retenant cependant sa compétence, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et violé le principe de séparation des autorités judiciaires et administratives ;

Mais attendu qu'après avoir exactement rappelé que le contrat de raccordement ne constitue pas un accessoire du contrat d'achat d'électricité et ne relève pas de la gestion par la société ERDF de l'ouvrage public du réseau public de distribution d'électricité dont elle a la charge, l'arrêt retient d'abord que la société ERDF agit en l'espèce pour son propre compte ; qu'il constate ensuite que le litige n'est pas fondé sur un refus d'accès au réseau public de distribution électrique ; qu'il relève encore que l'action délictuelle ou quasi-délictuelle en cause a été introduite par une société de droit privé contre la société ERDF, société anonyme de caractère commercial, et son assureur, et qu'elle se fonde sur la perte du bénéfice d'un certain tarif d'achat résultant du traitement tardif d'une demande de raccordement au réseau de distribution électrique ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, excluant la qualification de dommage de travaux publics invoquée par le moyen, la cour d'appel a retenu à bon droit la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur les deuxièmes moyens des pourvois n° C 14-15. 123 et N 14-15. 592, pris en leurs deux premières branches, rédigés en termes identiques, réunis :

Attendu que la société Axa fait grief à l'arrêt de dire que la société Green Yellow a été privée, par suite du non-respect par la société ERDF du délai de traitement de sa demande de raccordement au réseau, du bénéfice de l'obligation d'achat de l'électricité photovoltaïque au tarif fixé avant le moratoire du 9 décembre 2010, par l'arrêté du 10 juillet 2006, de fixer le préjudice indemnisable à hauteur de 80 % et de la condamner, en sa qualité d'assureur de la société ERDF, à garantir cette dernière pour l'ensemble des condamnations qui seront mises à sa charge alors, selon le moyen :

1°/ que la Cour de cassation est compétente pour apprécier, pour la première fois, la conformité au droit de l'Union d'un acte administratif réglementaire ; que le mécanisme de compensation des surcoûts imposés à EDF par l'obligation d'achat de l'électricité d'origine photovoltaïque à un prix supérieur à celui du marché constitue une aide d'Etat qui doit faire l'objet d'une notification à la Commission européenne préalablement à son entrée en vigueur dans l'ordre interne, sous peine d'illégalité ab initio ; qu'en jugeant que la société Green Yellow a été privée du bénéfice des tarifs d'achat escomptés sur la base de l'arrêté du 10 juillet 2006 quand le mécanisme institué par cet acte est pourtant illégal, la cour d'appel a violé les articles 1382 du code civil ensemble l'article 108, § 3, du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) ;

2°/ qu'en conséquence, la perte d'un avantage dont l'obtention serait contraire au droit ne peut être considérée comme un préjudice réparable ; que l'arrêté tarifaire sur la base duquel est assise la demande de réparation formulée par la société Green Yellow étant illégal, la cour d'appel ne pouvait juger réparable le prétendu préjudice qu'elle invoquait sans violer l'article 1382 du code civil ;

Mais attendu que par arrêt du 14 décembre 1995 la Cour de justice des Communautés européennes a dit pour droit (C-430/ 93 et C-431/ 93) que le droit communautaire n'impose pas aux juridictions nationales de soulever d'office un moyen tiré de la violation de dispositions communautaires, lorsque l'examen de ce moyen les obligerait à renoncer à la passivité qui leur incombe, en sortant des limites du litige tel qu'il a été circonscrit par les parties et en se fondant sur d'autres faits et circonstances que ceux sur lesquels la partie qui a intérêt à l'application desdites dispositions a fondé sa demande ; qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni des conclusions de la société Axa que celle-ci se soit prévalue de la violation de l'article 108, § 3, du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ; que le moyen, nouveau et mélangé de fait et de droit, est irrecevable ;

Sur les deuxièmes moyens des pourvois n° C 14-15. 123 et N 14-15. 592, pris en leur troisième, quatrième, cinquième et sixième branches, rédigés en termes identiques, et le moyen unique du pourvoi n° Z 14-15. 074, pris en ses sixième, septième, huitième, neuvième, dixième, onzième et douzième branches, réunis :

Attendu que la société ERDF et la société Axa font le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen :

1°/ que seul le préjudice certain est réparable à l'exclusion du préjudice hypothétique ; qu'en jugeant tel le prétendu préjudice invoqué par la société Green Yellow quand elle relevait par ailleurs, non seulement, que les incertitudes pesant sur la filière photovoltaïques dans un contexte évolutif du cadre législatif et réglementaire pouvaient avoir des répercussions directes sur le contrat d'achat d'électricité, mais encore, que des aléas de nature technique et financière pouvaient empêcher la réalisation des projets ayant fait l'objet d'une demande complète de raccordement de leur installation, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation de l'article 1382 du code civil ;

2°/ que, ce faisant, s'est prononcée par des motifs contradictoires en violation des articles 455 et 458 du code de procédure civile, la cour d'appel qui a retenu, tout à la fois, que le préjudice subi par la société Green Yellow est « seulement éventuel » et que cette société peut se prévaloir d'une perte de chance, constitutive d'un « préjudice certain » ;

3°/ qu'en se bornant à indiquer que la société Green Yellow peut se prévaloir de la perte d'une chance par la disparition certaine d'une éventualité favorable constitutive d'un préjudice certain, la réparation de la perte de chance devant être mesurée à la chance perdue, pour juger que le prétendu préjudice de ladite société sera indemnisé à hauteur de 80 %, la cour d'appel a privé sa décision base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;

4°/ que faute d'avoir recherché, comme elle y était pourtant expressément invitée, si le fait générateur de ce préjudice ne résidait pas en réalité dans les modifications successives des tarifs de rachat d'électricité photovoltaïque et l'instauration d'un moratoire de plusieurs mois, la cour d'appel, a laissé sans réponse un moyen péremptoire développé par la société Axa CS, en méconnaissance des articles 455 et 458 du code de procédure civile ;

5°/ que la contradiction des motifs équivaut à leur absence ; qu'en retenant tout à la fois, d'un côté, que la perte d'une chance d'avoir conclu un contrat d'achat d'électricité aux conditions tarifaires antérieures au décret du 9 décembre 2010 n'était pas un préjudice réparable et, de l'autre, que l'impossibilité pour le producteur de bénéficier de l'obligation d'achat d'électricité à ce même tarif constituait la perte d'une espérance légitime indemnisable, la cour d'appel s'est contredite en méconnaissance de l'article 455 du code de procédure civile ;

6°/ que les circonstances constitutives d'une faute commise lors de la période des pourparlers précontractuels ne peuvent être considérées comme la cause du...

Pour continuer la lecture

SOLLICITEZ VOTRE ESSAI

VLEX uses login cookies to provide you with a better browsing experience. If you click on 'Accept' or continue browsing this site we consider that you accept our cookie policy. ACCEPT