CAA de VERSAILLES, 3ème chambre, 10/05/2022, 20VE00870, Inédit au recueil Lebon

Presiding JudgeMme DANIELIAN
Judgement Number20VE00870
Record NumberCETATEXT000045784332
Date10 mai 2022
CounselCABINET BAKER & MCKENZIE
CourtCour administrative d'appel de Versailles (Cours Administrative d'Appel de France)
Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Total EetP France a demandé au tribunal administratif de Montreuil de prononcer la restitution de la taxe sur le chiffre d'affaires des entreprises exploitant une installation soumise à quotas d'émission de gaz à effet de serre à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2012, pour un montant total de 221 934 euros.

Par un jugement n° 1510773 du 16 mars 2017, le tribunal administratif a de Montreuil fait droit à sa demande.

Par un arrêt n° 17VE01519 du 18 avril 2019, la cour administrative d'appel de Versailles a rejeté l'appel formé par le ministre de l'action et des comptes publics contre ce jugement et mis à la charge de l'État le versement de la somme de 1 500 euros à la société Total EetP France en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par une décision n° 431805 du 10 mars 2020, le Conseil d'État a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Versailles du 18 avril 2019 et renvoyé l'affaire à cette cour.



Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 15 mai et 30 novembre 2017 et le 24 mai 2018, et après cassation, les 12 janvier 2021 et 25 janvier 2022, le ministre de l'économie, des finances et de la relance demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montreuil du 16 mars 2017 ;

2°) d'ordonner le remboursement par la société Total EetP France de la taxe sur le chiffre d'affaires des entreprises exploitant une installation soumise à quotas d'émission de gaz à effet de serre à laquelle cette société a été assujettie au titre de l'année 2012, pour un montant de 221 934 euros.

Il soutient que :
- le simple fait que les entreprises sous " ETS " (Emission Trade Scheme) soient soumises à une taxation sur le chiffre d'affaires ne suffit pas à établir que le principe communautaire de gratuité dans l'allocation des quotas d'émission de gaz à effet de serre ait été méconnu ; s'il existe un lien entre cette taxe et l'allocation de quotas, cette taxe reste assise sur le chiffre d'affaires des entreprises et non sur le nombre des quotas délivrés gratuitement, le mécanisme de plafonnement mis en place venant simplement corriger les effets d'une taxation en limitant la contribution des petits allocataires ;
- l'objectif de cette taxe était de ne pas alourdir le déficit budgétaire et de respecter le droit communautaire en ne modifiant pas la répartition des quotas déjà alloués et en ne revenant pas sur le choix fait par la France d'allouer ces quotas gratuitement ;
- eu égard au faible nombre de contribuables ayant bénéficié du mécanisme de plafonnement et à l'impact non significatif de ce dispositif sur le montant global de la taxe, celui-ci ne constitue pas le principal critère de calcul de la taxe en litige et, par suite, cette taxe ne peut être regardée comme une charge grevant l'affectation des quotas, en méconnaissance de l'article 10 de la directive du 13 octobre 2003 ;
- l'analyse et le chiffrage effectués par la société s'avèrent erronés pour ce qui concerne l'incidence du plafonnement sur le rendement de la taxe ;
- le mécanisme du plafonnement ne constitue pas une atteinte au principe d'égalité garanti par les articles 14 et 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 23 octobre 2017 et les 12 avril et 26 décembre 2018, et après cassation les 3 juillet 2020 et 17 mars 2021, la société Total EetP France, représentée par Me Meier, conclut, dans le dernier état de ses écritures :

1°) au rejet de la requête ;

2°) à titre subsidiaire, au renvoi à la Cour de justice de l'Union européenne de la question préjudicielle de savoir si la directive 2003/87/CE s'oppose à l'instauration d'une imposition à laquelle sont uniquement assujettis les attributaires de quotas d'émission de gaz à effet de serre dans le cadre du PNAQ II et assise soit sur leur chiffre d'affaires soit, en application d'une règle de plafonnement, sur le nombre de quotas attribués, et dans l'attente qu'il soit statué sur cette question, au sursis à statuer ;

3°) à ce qu'une somme de 10 000 euros soit mise à la charge de l'État au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :
- la taxe sur le chiffre d'affaires des entreprises exploitant une installation soumise à quotas d'émission de gaz à effet de serre, instaurée par l'article 18 de la loi du 28 décembre 2011, est non conforme au principe de gratuité de l'attribution de ces quotas garanti par la directive 2003/87/CE, et au plan national d'affectation des quotas d'émission de gaz à effet de serre pour la période de 2008-2012 (PNAQ II) dans la mesure où l'assiette de la taxe est liée au nombre de quotas alloués et où le mécanisme de plafonnement de la taxe sur le chiffre d'affaires a pour effet d'instituer une charge prélevée au titre de l'affectation des quotas ;
- le mécanisme de plafonnement a eu, dans les faits, une incidence significative sur le produit total de l'imposition représentant plus de 20 millions d'euros soit 17,24 % du montant total de la taxe perçue par l'État ;
- il existe des incohérences dans les méthodes présentées par le ministre, notamment sur le nombre de redevables ;
- l'article 18 de la loi du 28 décembre 2011, qui revient à remettre en cause le choix de la France d'attribuer les quotas d'émission de gaz à effet de serre à titre gratuit dans le cadre du...

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